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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

esprits. Les calomnies de la presse, suspendues pendant quelques jours, recommencèrent avec acharnement. Le ministre de l’intérieur, ayant cru pouvoir retarder de six heures le départ des malles-postes, afin de faire connaître aux départements le vote de l’Assemblée, fut attaqué comme s’il avait commis un crime d’État. Une liste de récompenses nationales qui avait été faite dans les premiers jours de la Révolution servit de texte à de nouvelles attaques contre des ministres qui n’en avaient pas même eu connaissance.

Le congrès de la presse départementale, qui avait décidé de seconder l’élection de Louis-Napoléon Bonaparte, répétait à l’infini les attaques de la presse parisienne.

Pendant ce temps, le candidat impérial, retiré dans une maison de campagne à Auteuil, pour éviter, disaient ses amis, les ovations populaires, attirait à lui tous les hommes influents, à quelque opinion qu’ils appartinssent. Il s’entretenait avec tous, à peu près comme il l’avait fait au temps de sa détention à Ham, parlant avec simplicité et avec un désintéressement apparent de l’avenir de la France. Il ne repoussait ni ne dédaignait personne. Le socialisme avait semblé d’abord avoir une part sérieuse dans ses préoccupations. Avant son départ de Londres, il avait vu M. Louis Blanc et M. Cabet. Dès son arrivée à Paris, il avait exprimé le désir de connaître M. Proudhon. Mais, après un séjour de quelques semaines, son appréciation de la force des partis s’étant modifiée, il rechercha plus ouvertement les hommes de la droite, en particulier les légitimistes, M. de Genoude, entre autres, et surtout les ultramontains. Il ne négligeait pas non plus d’autres moyens de gagner à ses intérêts des personnages moins importants, mais qui disposaient de quelque publicité ou qui exerçaient quelque influence, fût-elle même subalterne, sur les esprits. Les hommes éminents de l’Assemblée, qui dans l’origine avaient été très-opposés à sa cause et à sa personne, ne luttaient plus contre ces influences, soit qu’ils fussent découragés