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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

accessible, arrêtèrent tout. Dans une nouvelle réunion du conseil, on décida, à la majorité d’une voix seulement, d’envoyer à Marseille un contre-ordre. Les troupes embarquées depuis cinq jours revinrent à terre. On remit les destinées de l’Italie aux délibérations d’un congrès à Bruxelles, qui ne devait jamais se réunir, et l’Autriche, délivrée ainsi de la crainte d’une intervention contre laquelle elle était résolue à ne pas lutter[1], retira une à une toutes les concessions qu’elle avait offertes et tourna contre ses autres États la politique de ruse dont elle n’avait plus besoin en Italie.

Déjà, selon le système traditionnel de cette politique, elle avait cherché à regagner en Hongrie le terrain qu’elle avait cru devoir céder, non pas en attaquant ouvertement l’indépendance des Hongrois, mais en leur suscitant des ennemis qui les missent hors d’état d’en profiter et de la défendre. Cela n’était pas difficile. La Hongrie, comme on sait, se compose d’une agglomération successive de populations magyares, valaques, croates, serbes, saxonnes, très-diverses d’origine, de religions, d’idiomes, et que de fréquentes luttes à main armée et des persécutions réciproques pendant plusieurs siècles ont rendues excessivement hostiles les unes aux autres. C’était là l’obstacle principal à l’organisation du nouvel État hongrois, dont la diète de Pesth, qui représentait presque exclusivement l’élément magyar, avait, avant la sanction de l’empereur, posé les bases constitutionnelles. Entre ces nationalités jalouses de la prépondérance des magyars, les Croates et les Serbes, de race slave, étaient à la fois les plus fanatiques, les mieux organisés militairement et les plus capables par leur énergie de revendiquer leur indépendance particulière.

Ce furent ceux-là que le gouvernement autrichien excita

  1. L’envoyé d’Autriche disait alors au cabinet anglais : « Si les Français entrent en Piémont, nous ne nous battrons pas ; nous nous retirerons derrière l’Adige d’abord, puis derrière l’Isonzo. »