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HISTOIRE

près le seul signe de vie que donne son gouvernement. En vain les amis du général Cavaignac, inquiets de voir l’intérêt, l’attention du pays se retirer insensiblement de lui et se porter ailleurs, le pressent de prendre quelque mesure énergique qui ranime son parti et fasse sentir sa force à ses adversaires. Les uns, frappés surtout du progrès de la réaction, lui conseillent de donner l’amnistie et d’intervenir en Italie où les Piémontais, les Lombards et les Vénitiens implorent à la fois le secours de la France. D’autres, au contraire, persuadés qu’il ne peut plus se maintenir au pouvoir qu’avec le concours du parti de l’ordre, l’engagent à choisir un ministère dans la droite de l’Assemblée.

Mais le chef du pouvoir exécutif ne sait se résoudre à temps ni pour l’une ni pour l’autre de ces politiques. Incertain, plein de scrupules, il hésite, il se défie de lui-même et de tout le monde, il ne sait ce que veut l’opinion. Les avances que lui font quelques hommes éminents des partis dynastiques lui sont suspectes, il les repousse avec hauteur ; l’amnistie que lui demandent les républicains lui paraît dangereuse, il la refuse ; un parti considérable dans l’Assemblée désire ajourner l’élection du président jusqu’après le vote des lois organiques, il insiste pour que l’élection soit immédiate, comme s’il avait hâte de se délivrer d’un pesant fardeau. Quant à l’intervention, il déclare dans son conseil au général Lamoricière qui en a fait une question d’honneur national, qu’il ne se sent pas le droit, à la

    plus humain qu’on ne l’a vu en d’autres circonstances, il n’en était pas moins révoltant, pour l’idée de justice telle que la conçoivent les sociétés modernes, de voir des vainqueurs juger des vaincus, sans contrôle et sans appel. Des faits singuliers se produisirent. On vit des officiers, blessés pendant le combat, nommés rapporteurs près des conseils de guerre. Le chef d’escadron Constantin fut arrêté aux Tuileries dans l’exercice des fonctions de rapporteur et convaincu d’avoir pris part à l’insurrection. Un insurgé qu’il interrogeait lui exprima sa surprise de le trouver là et lui dit : « Rappelez-vous donc que vous deviez être notre ministre de la guerre. »

    On avait décidé que 20,000 ouvriers libres seraient envoyés en Algérie. Le premier convoi partit le 3 septembre.