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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

séance du 3 juillet, que personne n’évaluait à plus de cinquante mille le nombre total des insurgés, et que l’armée comptait en tout sept cent trois hommes tués ou blessés.

Cependant les convois et les services funèbres se succédaient avec une continuité lugubre. Le 6 juillet, on fit une cérémonie générale en l’honneur de toutes les victimes de l’insurrection. Au pied de l’obélisque de Louqsor, un autel somptueux fut dressé où trois évêques, appartenant à l’Assemblée constituante, célébrèrent le service divin. L’Assemblée et son président, le général Cavaignac, le maire de Paris, la plupart des officiers supérieurs de l’armée, les chefs de la garde nationale, y assistaient. Un char symbolique, surmonté d’un catafalque et qui renfermait les corps d’un certain nombre de victimes, s’avança par l’avenue des Champs-Élysées vers l’autel et fut béni par les évêques.

Mais, malgré l’appareil extraordinaire que l’on avait voulu déployer en cette solennité, elle parut vide et froide à tous ceux qui en saisirent le caractère. Tout y était officiel, contraint, plein de contradictions. On y voyait bien encore les emblèmes républicains ; on y lisait partout la devise : Liberté, égalité, fraternité, mais elle ne faisait plus naître d’autre sentiment que celui d’une amère ironie. Pour la première fois aussi depuis la révolution de février, le peuple était absent d’une cérémonie publique. Aucune cor-

    périeurs. On a compté six généraux tués : ce sont les généraux Bourgon, Damesme, Renaut, Duvivier, Négrier, Bréa ; et six blessés : Bedeau, François, Korte, Lafontaine, Foucher, Courtigis. Deux représentants ont été tués, MM. Dornès et Charbonnel. Pendant les trois journées de juillet 1830, il y avait eu 500 hommes tués. Au mois de février 1848, on n’en a compté que 200. Selon le général Lamoricière, deux millions cent mille cartouches auraient été distribuées aux soldats, et environ trois mille coups de canon auraient été tirés pendant les quatre jours du combat. Les insurgés avaient des armes en quantité ; sur un seul point, dans le petit village de Gentilly qui compte à peine 1,200 habitants, on trouve 1,800 fusils de munition et 2,000 sabres ; mais ils avaient fort peu de munitions. Ils fabriquèrent eux-mêmes presque toute la poudre dont ils se servirent. Vers la fin du troisième jour, elle leur manquait.