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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

une froide obstination, sans donner aucun motif de son refus[1], M. Charras, qui était présent à ce colloque et à l’embarras où se trouvait le général en chef, lui désigna le général Négrier, qui arrivait au même instant de Versailles, comme parfaitement capable de remplir avec honneur cette mission périlleuse.

Négrier accepte avec empressement le commandement qui lui est offert. Il part aussitôt, à la tête de deux escadrons de dragons, de quelques détachements d’infanterie et de gardes nationaux de la banlieue, pour recommencer l’attaque. La troupe remporte de continuels avantages. Vers deux heures environ elle s’était emparée du pont Marie : elle avait enlevé les barricades du quai Saint-Paul, de la rue de l’Étoile, de la rue des Barres et de la rue du Petit-Musc ; elle avait délogé les insurgés des greniers d’abondance. Elle occupait le pont d’Austerlitz, elle touchait à l’entrée de la gare de l’Arsenal. Là, le général Négrier partage sa colonne. Il prend à droite, par le boulevard Contrescarpe ; M. Edmond Adam prend à gauche, par le boulevard Bourdon. On s’avance ainsi jusqu’à l’angle de la place de la Bastille.

De son côté, le général Perrot, qui commande à la place du général Renaut, dégageait la rue Saint-Antoine, où il emportait, une à une, soixante-huit barricades, les plus fortes qu’on eût encore eu à détruire[2] ; il chassait les insurgés de maison en maison, reprenait la mairie du huitième arrondissement et poussait enfin, après avoir enlevé la dernière barricade, jusqu’à l’angle de la rue Saint-Antoine et de la place. On était convenu d’y attendre la jonction des troupes du général Lamoricière, qui opérait simultanément dans le faubourg du Temple.

  1. On a prétendu que le dépit de s’être vu ôter le commandement des forces destinées à la défense de l’Assemblée avait inspiré au général Baraguay-d’Hilliers ce triste refus.
  2. Ces barricades étaient construites avec des charrettes remplies de pavés et des troncs d’arbres renversés.