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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

« Nous, soussignés, général Bréa, colonel Thomas, de Ludre, représentant du peuple, déclarons être venus aux barrières pour annoncer au bon peuple de Paris et de la banlieue que l’Assemblée nationale a décrété qu’elle accordait trois millions en faveur des classes nécessiteuses. Je suis entouré à la barrière de Fontainebleau de braves gens, républicains, démocrates, socialistes… »

Le maire, qui suivait avec inquiétude tous les mouvements de la foule, s’empare de cette déclaration avant même que le général ait achevé de lui donner un sens, et, s’approchant de la fenêtre, il s’apprête à en faire la lecture ; mais la foule ne veut rien entendre.

Des femmes, accourues du Panthéon, viennent de dire qu’on y massacre les prisonniers. Elles racontent la mort de Raguinard, l’un des chefs les plus populaires de l’insurrection, qu’elles ont vu fusiller. La multitude, de plus en plus agitée par ces récits, s’apercevant que le maire veut gagner du temps et sauver Bréa, envahit de nouveau la salle ; elle crie, elle vocifère, elle exige que le général signe un ordre à la troupe de se retirer.

Etourdi, étouffé, saisi au collet, le général Bréa cède encore à ces violences. Il commence à écrire d’une main mal assurée : « J’ordonne à la troupe de se retirer par le même chemin qu’elle a pris pour venir. »

On respire un moment ; les mêmes hommes qui, depuis le commencement de ces horribles scènes, entourent le. général, l’entraînent au grand poste, où ils espèrent pouvoir le protéger plus efficacement. On y retrouve MM. Gobert, Desmarets, Mangin, qui ont subi les traitements les plus indignes. Ils sont là, gardés à vue par quelques gardes nationaux de la banlieue, qui voudraient les faire évader.

Déjà on a commencé à percer un mur mitoyen ; sous peu de minutes la brèche sera assez large pour qu’un homme y puisse passer ; mais, dans la hâte que l’on a mise à ce travail, on n’a pas aperçu un enfant. Celui-ci a tout vu et, se