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HISTOIRE

éclatent ; l’incendie dévore les charpentes ; une fumée épaisse remplit des rues entières, aveugle les combattants, enveloppe et cache à demi ces scènes de dévastation. Le colonel Dulac, avec son régiment, l’un des plus éprouvés de l’armée, seconde admirablement le général Lamoricière. C’est lui que le général choisit toujours pour l’envoyer sur les points périlleux ; c’est lui qu’il charge d’enlever les barricades les plus formidables.

Toute cette longue journée du 24 se passe en combats sanglants ; les insurgés se défendent pied à pied ; c’est à peine si l’on s’aperçoit qu’ils reculent. Vers le soir, seulement, Lamoricière, qui a voulu conduire lui-même l’attaque de l’entrepôt de la Douane, et qui vient d’y avoir un cheval tué sous lui, réussit à s’en emparer et coupe en deux l’insurrection. Tandis qu’il en rejette une moitié vers la Villette, l’autre moitié est repoussée vers Montmartre par les troupes que commande le général Lebreton.

Dès le matin, le général Lebreton a reconnu une excellente position dans les abattoirs Montmartre, d’où l’on domine les barricades construites à la barrière Rochechouart. Il y envoie une partie du 2e bataillon de la 3e légion et un peloton du 21e de ligne ; il fait placer des hommes aux fenêtres des maisons qui plongent à la fois sur la barricade et sur la barrière et commande une décharge générale qui met la plupart des insurgés hors de combat. Ce qui reste s’embusque dans les bâtiments de l’octroi et dans les maisons voisines. Une vive fusillade s’engage et continue sans interruption pendant quatre heures. Les soldats réussissent à débusquer les insurgés de cette position ; puis le général Lebreton les ramène à l’assaut de la barricade Poissonnière, dont on parvient, après des efforts inouïs, à se rendre maître.

Sur la rive gauche de la Seine, dans le faubourg Saint-Marcel, la lutte, qui se prolongeait, suivait à peu près les mêmes phases que sur la rive droite. Le 23, les barricades, construites en assez grand nombre dans les rues Mouffe-