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HISTOIRE

L’Assemblée répond par le cri de : « Vive la République ! »

M. de Lamartine paraît à son tour. Il conjure l’Assemblée de ne pas aller aux barricades comme on l’a annoncé. « C’est aux membres du pouvoir exécutif à s’y rendre ; c’est à eux, dit-il, d’aller où la gloire les appelle. » Puis il monte à cheval pour se joindre à la colonne du général Cavaignac, dont j’ai dit plus haut la marche. Le président suspend la séance jusqu’à huit heures du soir.

Quand l’Assemblée se réunit de nouveau, l’aspect de Paris est lugubre ; les maisons sont hermétiquement fermées, les rues désertes ; un silence sinistre plane sur la ville. De loin à loin, quelques décharges, quelques coups de feux isolés, annoncent que la nuit n’apporte pas la fin, mais la suspension momentanée des hostilités, nécessitée par les ténèbres. On entend à distance, sur la rive droite, battre la générale. Le tocsin sonne dans les faubourgs. Les représentants voudraient paraître calmes, mais l’anxiété la plus vive se lit sur les visages. Chacun apporte des nouvelles de son quartier. Tous sont persuadés que l’insurrection se propage ; on lui suppose un plan savamment combiné ; on dit que les barricades sont construites selon toutes les règles de l’art des fortifications ; les soldats, dit-on, sont peu animés. On doute beaucoup de l’efficacité des mesures prises par le gouvernement ; la garde nationale, qui a perdu beaucoup de monde, se défie à l’excès de la commission exécutive ; tout le monde est d’accord sur un point : c’est que, soit trahison, soit négligence, la troupe est partout insuffisante.

Cependant, M. Considérant est monté à la tribune. Il apporte une proclamation aux ouvriers qu’il a rédigée de concert avec M. Louis Blanc, et qu’ont signée M. Jules Simon et une soixantaine de représentants. « Cette proclamation a pour but, dit-il, de rassurer les ouvriers sur leur sort, de leur faire comprendre que leurs souffrances ont été engendrées par la fatalité des choses et non par la faute des classes ou des hommes ; elle leur annonce que l’As-