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HISTOIRE

jusqu’aux marins des rades de Brest et de Cherbourg[1].

Il est nuit quand le général Cavaignac rentre à la Présidence. Il est accueilli par des reproches de M. Ledru-Rollin et par des nouvelles désastreuses. Le combat, dans la Cité et le faubourg Saint-Jacques, a été meurtrier ; la troupe a fait des pertes considérables, sans remporter d’avantages décisifs. L’église du Panthéon est au pouvoir des insurgés. Le général Damesme envoie, coup sur coup, des aides de camp pour demander quelques bataillons de renfort.

Sans répondre à M. Ledru-Rollin, sans prendre un moment de repos, le général Cavaignac, après avoir donné quelques ordres à la hâte, remonte à cheval, afin d’aller porter en personne des instructions précises sur les centres d’opérations qu’il n’a pas visités. Il lui tarde surtout de voir le général Bedeau, dont la situation est plus grave, plus périlleuse encore peut-être que celle du général Lamoricière. Il est évident que tous les efforts des insurgés convergent vers l’Hôtel de Ville. La prise de la maison commune, qui est le siège traditionnel du gouvernement populaire, donnerait en quelque sorte un caractère légal à l’insurrection ; aussi, les insurgés font-ils des efforts inouïs pour s’en rendre maîtres. Ils l’enveloppent d’un réseau de barricades, qui va se resserrant et se rapprochant avec une rapidité effrayante. Ils le menacent à la fois de quatre côtés : par la Cité, par la rue Saint-Antoine, par la rue du Temple et par la rue Saint-Martin. Leurs avant-postes ont paru déjà sur la place du Marché-Saint-Jean, sur la place Baudoyer, autour de l’église Saint-Gervais. Des feux de tirailleurs, qui partent des maisons situées entre la place de l’Hôtel-de-Ville et la place du Châtelet, harcèlent la troupe.

L’hôtel de ville est situé, comme on sait, sur la rive droite

  1. Le deuxième régiment d’infanterie de marine, transporté très-rapidement de Brest à Paris par le chemin de fer, y arriva le lundi matin et prit part à l’affaire de la barrière Fontainebleau. Les officiers étaient très-animés ; ils criaient en brandissant leurs sabres : « Nous venons mourir pour la République ! »