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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

plus de la moitié des casernements qui suffisaient en temps ordinaire étant occupés depuis le mois de mars par la garde mobile. Il ne pouvait donc pas mettre à la disposition du général en chef plus de dix à douze mille hommes prêts au combat.

La garde mobile, forte de quinze à seize mille hommes, n’inspire aucune sécurité. Ce sont des enfants des faubourgs ; les fera-t-on marcher contre le peuple ? tireront-ils sur leurs parents, sur leurs frères ? On sait, d’ailleurs, que les ouvriers comptent sur eux ; qu’ils sont très-pratiqués par les factions. Ils ont élu, pour les commander, plusieurs partisans déclarés de Louis-Napoléon Bonaparte. On parle d’un complot qui se tramerait dans leurs rangs en faveur du prince ; on dit que les chefs de bataillon se sont réunis, le 18 et le 20, pour décider ensemble si l’on se battrait, et de quel côté des barricades.

La garde républicaine, malgré les mesures prises pour sa réorganisation, n’éveille pas moins de défiance que la garde mobile. Quant à la garde nationale, outre que plusieurs légions, la 12e et la 8e entre autres, appartiennent au parti de Barbès et que les légions de la banlieue sont généralement bonapartistes[1], le général Cavaignac ne fait aucun fonds sur elle. Il la juge bonne, tout au plus, à retarder de quelques heures l’engagement des troupes. Et ces troupes elles-mêmes, cette armée démoralisée par sa récente défaite et par les souvenirs de 1830, ces soldats dont il est peu connu, ces généraux, sur lesquels il ne se sent pas d’autorité, comment se porteront-ils à la rencontre de l’ennemi commun ? Comment feront-ils cette guerre perfide des rues, dans une ville qui leur est devenue presque étrangère après un long séjour en Afrique ? Enfin, et ceci

    l’Hôtel de Ville. Cependant le gouvernement ne crut pas pouvoir laisser ce régiment dans Paris.

  1. Le 23 juin, la garde nationale de Grenelle, dirigée sur les Tuileries, se mit en marche au cri de : « Vive Napoléon ! » et déclara que si on l’envoyait aux barricades, elle ne tirerait point.