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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

M. de Falloux traversa toute la salle pour lui mieux témoigner son admiration et sa sympathie.

Cependant les républicains politiques, ceux qu’on appelait encore les républicains de la forme, ou de la république bourgeoise, ne voulurent pas rester sous le coup des accusations du philosophe socialiste. Ils avaient à cœur de laver le gouvernement, dont ils avaient fait ou dont ils faisaient encore partie, des reproches si graves qui venaient de lui être adressés. Ils poussent en quelque sorte M. Goudchaux à la tribune. Le ministre des finances des premiers jours de la République venait d’être élu représentant. Il avait la faveur de l’Assemblée parce qu’on le savait adversaire prononcé des théories communistes. On n’ignorait pas non plus son opinion invariable sur la question des biens de la maison d’Orléans ; son opposition constante à tout projet d’émission de papier-monnaie. Il est accueilli avec une bienveillance marquée.

M. Goudchaux s’attache à relever, dans le discours de M. Pierre Leroux, d’assez nombreuses erreurs de chiffres ; il dit qu’à son avis on a beaucoup exagéré le péril, que l’on va chercher un remède inouï pour un mal auquel il est très-facile de porter remède ; ce remède, affirme M. Goudchaux, il est très-simple, il est dans l’organisation du travail.

À ce mot, qui avait si fort offusqué l’Assemblée quand M. Louis Blanc l’avait prononcé pour la première fois, on se regarde avec une surprise extrême. M. Goudchaux explique sa pensée. « Sous Louis-Philippe, dit-il, les travailleurs qui sont le nerf, la vie du pays, étaient dans une situation insoutenable ; ils ne jouissaient pas de l’égalité ; ils l’avaient en droit, pas en fait ; ils manquaient des choses nécessaires pour sortir de la position dans laquelle ils se trouvaient. Un conseil de prud’hommes les jugeait ; ce conseil était composé d’une manière partiale et rendait des jugements partiaux. Les lois du pays étaient également défavorables aux ouvriers. À cette époque, la grève avait toutes mes sympathies. »