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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

nir en aide aux industriels, aux commerçants et aux ouvriers, par des primes à l’exportation, par des avances sur les salaires, par des commandes directes, par l’organisation d’un système de caisses de retraite et d’assistance. À plusieurs reprises, M. Trélat se rendit dans la commission nommée par l’Assemblée pour lui communiquer et lui faire agréer l’ensemble, ou tout au moins une partie de ces propositions ; mais il rencontrait dans la commission une opposition décidée. Le président, M. Goudchaux, combat les projets au point de vue financier, il allègue la pénurie du Trésor. M. de Falloux, qui a ses vues cachées et qui poursuit un plan politique, prodigue toutes les ressources de son esprit pour déconcerter et tromper tous ceux des membres de la commission qui souhaitent des mesures tempérées : il veut, il lui faut la dissolution immédiate des ateliers nationaux.

La lutte à main armée que tout le monde prévoit, que les républicains appréhendent comme le plus grand péril que puisse courir la République, il ne la craint pas, lui, qui n’a vu dans la révolution qu’un moyen extrême, mais assuré, de revenir à la monarchie légitime. Il redoute bien plutôt que, par des mesures prudentes et bien combinées, on gagne sans secousse le moment prochain où l’Assemblée va discuter la constitution. Si cette constitution est faite en conformité avec les principes de la révolution de Février, si elle est votée en pleine paix publique, sans effroi, sans que la scission entre la bourgeoisie et le prolétariat soit consommée, l’état républicain, selon toute vraisemblance, est fondé ; la démocratie française a trouvé son expression et sa forme. Pour les ambitieux des partis royalistes, c’est là la plus insupportable des perspectives, la pire des humiliations. Mieux vaut cent fois le mal passager d’une insurrection de prolétaires, que l’on ne peut manquer de vaincre, et qui produira sur les âmes un salutaire effroi.

C’est à cette politique pleine d’arrière-pensée, à ce tortueux esprit d’égoïsme et de rancune, qu’il faut attribuer