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HISTOIRE

tiées à la conjuration affirment qu’elle était mieux ourdie. On avait eu le temps de mieux s’entendre avec les mécontents des divers partis. L’embauchage des troupes était depuis plus longtemps pratiqué et sur une plus large échelle. Un général était à demi gagné ; un régiment tout entier devait trahir. Le prince, qui avait réalisé à peu près tout ce qui lui restait de fortune, s’était procuré des armes et des munitions. Il avait recruté une espèce de maison militaire. Ses proclamations, ses décrets étaient imprimés d’avance.

Le 4 août on s’embarque sur un bateau à vapeur loué à la Compagnie commerciale de Londres, sous le prétexte d’une partie de plaisir. Pendant la traversée, le prince découvre ses projets à l’équipage et aux passagers. Il lit ses proclamations et son ordre du jour. « Il se rend, dit-il, aux vœux du peuple français ; du peuple livré, en 1814 et en 1815, par la trahison, aux baïonnettes étrangères ; du peuple trompé, en 1830, par de misérables intrigues. Héritier du plus grand nom des temps modernes, il a des devoirs à remplir envers la nation ; il vient pour la rétablir dans l’exercice de sa souveraineté ! »

Les conjurés, à qui l’on a distribué du vin et des largesses, crient ; « Vive l’Empereur ! » On revêt les uniformes dont les chefs de la conspiration ont fait emplette, on prépare les aigles, on apporte l’épée d’Austerlitz. Alors le prince fait connaître les premiers décrets de son gouvernement. Il prononce la déchéance de la dynastie d’Orléans, l’adoption des constitutions impériales. Il annonce que M. Thiers est président de son conseil.

Entre quatre et cinq heures du matin, le 6 août, on débarque sur la côte de France, à Vimereux, non loin de Boulogne-sur-Mer. Le lieutenant Aladenise et trois sous-officiers du 42e de ligne attendent le prince sur la plage et le reçoivent au cri de : « Vive l’Empereur ! » Ils promettent d’enlever par acclamation les deux compagnies qui sont en garnison à Boulogne. Le cortége se