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HISTOIRE

la tribune de ce que l’on braquait des canons sur la préfecture. Le général Bedeau donna quelques explications ; il affirma qu’en ce point le général Tempoure avait excédé ses ordres ; Caussidière parut s’apaiser. Alors M. de Lamartine, saisissant le moment favorable, l’emmena dans sa voiture, l’exhorta, pour prévenir un conflit, à donner sa démission et à faire sortir ses hommes. M. Caussidière ne pouvait s’y résoudre ; il croyait la République menacée ; il se savait très-populaire, en mesure d’engager la lutte. Les bonnes paroles de M. de Lamartine ne le persuadaient qu’à demi cependant il finit par céder et promit sa démission. À son tour, M. de Lamartine s’engagea à obtenir du général Bedeau et de M. Clément Thomas, qui continuaient le blocus de la préfecture, des conditions honorables pour la garnison.

On arrive ainsi au petit pont Saint-Michel un nombre considérable de gardes nationaux se trouvaient là. À la vue de M. Mercier, qui escortait la voiture à cheval, en uniforme de colonel de la garde républicaine, ils entrent en rumeur. M. Caussidière met la tête à la portière ; il est aussitôt reconnu ; on crie « À l’eau ! mort à Caussidière ! » On serre de près le cheval de M. Mercier ; on allait lui faire un mauvais parti, quand M. de Lamartine saute à bas de la voiture, monte sur le siége pour dominer la foule, harangue et parvient à calmer un peu ces colères insensées. La voiture reprend son chemin. M. Caussidière, fidèle à sa promesse, rédige sa double démission de représentant et de préfet de police. M. Clément Thomas fait connaître à M. Mercier le décret de licenciement et de réorganisation des Montagnards et de la garde républicaine ; mais il consent à ce que la préfecture ne soit évacuée que le lendemain matin, à la condition, toutefois, qu’une centaine de gardes nationaux y seront introduits sur l’heure.

Le lendemain, les gardes républicains sortirent en silence, mais la rage dans le cœur. Quoiqu’on eût promis aux officiers la conservation de leurs grades, on les des-