Page:Agoult - Histoire de la révolution de 1848, tome 2.djvu/26

Cette page a été validée par deux contributeurs.
22
HISTOIRE

Le palais des Tuileries était aussi, depuis le 25, le théâtre de scènes étranges. Quand M. Saint-Amand, capitaine dans la première légion de la garde nationale, fut envoyé par le gouvernement provisoire pour en prendre le commandement et le préserver de la dévastation, il y trouva des postes d’hommes du peuple qui s’étaient formés spontanément dans ce dessein, et qui exerçaient une police rigoureuse à la sortie du palais, afin de prévenir ou de châtier toute tentative de vol[1]. Le ministre de l’intérieur avait chargé MM. Mérimée, Léon de Laborde, Cavé et Châlons d’Argé de faire retirer les tableaux et les autres objets d’art. M. de Pontécoulant était autorisé, par M. Arago, à opérer la recherche et le classement des papiers appartenant à la famille royale. On transporta les diamants et l’argenterie au trésor et à l’hôtel de la Monnaie, dans des fourgons escortés par des ouvriers et par des élèves de l’école polytechnique. Enfin, malgré la foule immense qui ne cessa, pendant plusieurs jours, de traverser la longueur des appartements royaux depuis la porte de la chapelle jusqu’au pavillon de Flore, il se commit peu de dégâts, et l’on n’eut à regretter la perte que d’un très-petit nombre d’objets de prix[2].

Le 1er  mars, conformément au décret du gouvernement provisoire, on organisa, dans les grands salons de réception du premier étage, un service d’hôpital pour les Invalides civils. Cent vingt lits reçurent les blessés. M. Leroy d’Étiolles fut nommé médecin en chef ; M. Imbert, ancien détenu politique, directeur du service. Le clergé accourut avec em-

    que la République soit en danger pour agir à la clarté des torches !… » On ignorait alors dans Paris que le préfet de police, qui trouvait politique d’effrayer la bourgeoisie, encourageait ces promenades nocturnes.

  1. Cette police fut si rigoureuse, qu’un homme fut fusillé sur l’heure sous le pavillon de l’horloge, parce qu’on trouva sur lui un couvert d’argent.
  2. Sur une valeur de trois millions d’argenterie, par exemple, il en manqua pour une dizaine de mille francs.