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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

que le vingt et unième. Outre le nom de M. Albert, deux noms d’ouvriers, ceux de MM. Corbon et Peupin, étaient portés par le parti clérical et marquaient la concession très-petite faite au prolétariat. Aucun des candidats du Luxembourg n’était élu. Les délégués, qui s’étaient flattés de disposer de 400,000 voix, n’en avaient pas réuni plus de 61,000 sur le nom de M. Savary, communiste. Les chefs d’écoles socialistes, MM. Barbès, Raspail, Pierre Leroux, avaient obtenu, le premier 64,065 et le dernier 47,284 voix. Le prolétariat, en tant que classe, était donc vaincu. Mais l’opinion républicaine restait victorieuse dans cette élection imposante de Paris, où l’indépendance et le choix raisonné des votes étaient beaucoup plus certains que dans tout le reste de la France.

L’élection des départements eut à peu près le même sens. Les tendances socialistes y obtinrent une assez large place. Le communisme, proprement dit, y parut en minorité imperceptible. Le nom de M. de Lamartine, élu dans dix départements, caractérisa ce moment de la révolution ; il marqua l’acception libérale, pacifique et conciliatrice que la grande majorité des électeurs entendait donner au mot de république.

Le clergé envoya à l’Assemblée plusieurs évêques et un assez grand nombre d’ecclésiastiques. Le parti légitimiste fut brillamment représenté par environ 130 députés, parmi lesquels on comptait MM. Berryer, de Falloux, la Rochejacquelein. À l’exception de M. Thiers, l’ancienne opposition dynastique revenait en masse à l’Assemblée nationale.

Une assemblée ainsi composée n’était assurément pas l’expression du prolétariat communiste, elle n’était pas même l’expression du mouvement révolutionnaire ; mais, siégeant à Paris, au foyer même de la révolution, sous l’action la plus vive des idées démocratiques, elle ne pouvait pas être rétrograde, et il y avait tout lieu, d’espérer qu’elle donnerait au pays une constitution largement et sincèrement républicaine. Je ne veux pas anticiper ici sur les évé-