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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

passa lui-même, fixa les points principaux où l’opposition devait porter l’attaque et posa en quelque sorte les bases du nouveau droit constitutionnel sur lequel ses concitoyens auraient à édifier l’indépendance de la Hongrie. Son grand sens politique lui faisait comprendre dès lors que la Hongrie ne devait pas combattre isolément pour des droits particuliers, mais se faire le champion du droit général de toute la monarchie autrichienne. « L’avenir de la dynastie, s’écriait-il, est, selon ma ferme conviction, intimement lié à la confédération fraternelle des peuples sur lesquels s’étend son empire ; et cette confédération, elle n’y peut parvenir qu’en inscrivant le droit des nationalités dans une constitution libérale. Ni le bourreau, ni la baïonnette ne seront jamais un moyen d’organiser et d’unir les peuples. » Ce discours, accueilli par des applaudissements passionnés, déterminait l’assemblée à envoyer à Vienne une députation où toutes les nuances d’opinion étaient représentées, et qui, sous la conduite de l’archiduc palatin, se chargeait de porter à l’empereur les vœux de la nation hongroise.

Nous venons de voir comment cette députation fut accueillie par le peuple. Le nom de Kossuth, déjà populaire à Vienne, avait plus d’une fois retenti pendant les jours précédents. Son discours du 3 mars, lu à haute voix par un étudiant, sous les fenêtres de la princesse de Metternich[1], avait passé de main en main et éveillé de vives sympathies pour sa personne et pour sa cause. La cour impériale, en voyant arriver la députation de Presbourg, comprit qu’elle allait être forcée d’étendre à la nation hongroise les concessions qu’elle venait de faire à l’Autriche, et, malgré la répugnance du parti qui triomphait dans les conseils, le langage énergique des députés, les instances officielles du prince Esterhazy, la déterminèrent à céder. Le 18 mars, la députation repartit triomphante pour Presbourg, empor-

  1. On sait que la princesse de Metternich, née comtesse Zicsy, est hongroise.