Page:Agoult - Histoire de la révolution de 1848, tome 1.djvu/70

Cette page a été validée par deux contributeurs.
54
INTRODUCTION.

Juillet était aussi mesquine dans ses rapports avec l’étranger qu’elle se montrait aveugle dans la conduite des affaires intérieures. La pusillanimité du plus vulgaire égoïsme y faisait taire les hardies traditions et le grand instinct de la France. Dominé par un faux amour-propre dynastique et par un désir puéril d’obtenir l’amitié des royautés légitimes, la quasi-légitimité, c’est le nom qu’on donnait à la royauté issue des barricades, acceptait, en fait et en droit, l’équilibre européen tel que l’avait créé la solennelle injustice des traités de 1815. Elle écartait les sympathies, elle trahissait les espérances des nationalités sacrifiées au congrès de Vienne, et tantôt par son langage, tantôt même par ses actes équivoques, elle décourageait ses alliés naturels pour obtenir des princes absolus le pardon de son origine révolutionnaire. Pendant les sept années du ministère présidé par M. Guizot, la tendance de plus en plus marquée de la politique conservatrice fut de se rapprocher des puissances absolutistes, et d’abandonner, pour les bonnes grâces douteuses de l’Autriche et de la Russie, les principes et les traditions de 89, l’intérêt historique et politique de la France.

Ainsi, par son action diplomatique tout autant que par son action administrative, le gouvernement de Louis-Philippe allait manifestement à l’encontre des vœux du pays et de ses intérêts véritables. Les classes riches, chez qui la fierté nationale s’alanguit aisément dans la mollesse cosmopolite d’une civilisation très-compliquée, suivirent sans trop de répugnance la politique antifrançaise de la branche cadette des Bour-