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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

Mais entre tous les ministres, le plus chargé de responsabilité devant l’opinion, ce fut le ministre des travaux publics, à qui échut la tâche difficile d’organiser les ateliers nationaux[1].

L’idée première des ateliers nationaux n’appartient point à la République de 1848. Les ateliers nationaux étaient implicitement et explicitement dans les cahiers de 1789 où l’on demandait que « le pauvre appartînt à la société comme le riche ; » que « toute aumône particulière fût sévèrement défendue ; » qu’on « assurât du travail à tous les pauvres valides ; » que « l’on créât des ateliers de charité, publics, provinciaux, nationaux où les personnes valides ou invalides de tout âge et sexe, pussent trouver en tout temps une occupation convenable à leur état et à leur situation[2]. » Dans

  1. Il n’est plus nécessaire aujourd’hui de réfuter la calomnie qui pendant si longtemps imputa à M. Louis Blanc la création et l’organisation des ateliers nationaux. L’esprit de parti qui accusait alors les chefs des écoles socialistes de tous les désordres, réussit cependant à donner le change pendant très-longtemps à l’opinion publique. Mais il a été authentiquement prouvé que M. Louis Blanc était resté étranger à toutes les délibérations qui ont eu trait aux ateliers nationaux, et que le système d’après lequel on les a organisés était de tous points contraire à ses théories. Voici comment M. de Lamartine a caractérisé les ateliers nationaux (Histoire la révolution de Février, t. II, p. 120). « Commandés, dirigés, soutenus par des chefs qui avaient la pensée secrète de la partie anti socialiste du gouvernement, les ateliers contre-balancèrent jusqu’à l’arrivée de l’Assemblée nationale les ouvriers sectaires du Luxembourg. Bien loin d’être à la solde de Louis Blanc, comme on l’a dit, ils étaient inspirés par l’esprit de ses adversaires » Dans sa déposition devant la commission d’enquête, M. Émile Thomas, directeur des ateliers nationaux, s’exprime en ces termes : « J’ai toujours marché avec la mairie de Paris contre l’influence de MM. Ledru-Rollin, Flocon et autres. J’étais en hostilité ouverte avec le Luxembourg. Je combattais ouvertement l’influence de M. Louis Blanc. » (Rapport de la commission d’enquête, v. II, p. 352). Enfin M. Garnier Pagès (Un épisode de la révolution de 1848, p. 48) dit : Je dois à la vérité de déclarer que les ateliers nationaux ont été ouverts avec l’approbation de tous les membres du gouvernement provisoire sans exception, et que du premier au dernier jour M. Louis Blanc est resté complétement étranger à leur direction. »
  2. Voir les cahiers de la noblesse et du tiers état et en particulier ceux de Paris, de Metz, de Riom, de Dourdan, etc.