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INTRODUCTION.

tâche. La révolution de 1830, en jetant une grande perturbation dans le monde politique, la leur avait rendu aisée. Elle avait étendu le champ de la discussion libre et favorisait ainsi la prédication et la propagande de toutes les nouveautés. Aussi vit-on instantanément paraître au grand jour une multitude de doctrines et de systèmes religieux ou sociaux qui jusque-là étaient demeurés dans l’ombre, circonscrits dans un petit nombre de livres et médités en silence par un petit nombre d’hommes. Il se fit une véritable irruption d’idées, suivie d’un mouvement de polémique qui agita les esprits, comme au temps de la réformation, et qui entraîna dans son cours les plus nobles intelligences. La première impulsion de ce mouvement était partie, nous l’avons vu, de Saint-Simon et de Fourier ; mais son action réelle, efficace, cette action qui remua jusqu’aux dernières couches de la société, et qui épouvanta plus tard les classes supérieures sous le nom de socialisme[1], ne s’exerça dans toute son extension et dans sa pleine liberté que sous le règne de Louis-Philippe. Nous allons essayer de la suivre dans ses directions diverses.

La première en date et en éclat de toutes les écoles socialistes fut l’école saint-simonienne. Dirigée depuis la mort de son fondateur, en 1825, par MM. Bazard et Enfantin, composée d’une jeunesse enthousiaste,

  1. Le nom collectif de socialisme n’a été donné aux différents systèmes de réformation sociale qu’après la révolution de 1848. Jusque-là on n’avait considéré les écoles et les sectes socialistes qu’isolément, sous le nom de babouvisme, de saint-simonisme, de fouriérisme, etc. ; sans les rapporter à ce principe commun qui les a fait désigner depuis sous le terme général de socialisme.