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HISTOIRE

les ressources et de tous les expédients ; il avait émis des bons du Trésor autant que le public en avait voulu prendre ; il avait laissé monter, au chiffre de 872 millions la dette flottante[1], non compris les caisses d’épargne ; il avait accru la dette perpétuelle par des emprunts successifs ; enfin il venait, vers les derniers mois de l’année 1847, d’en contracter un dont les payements s’échelonnaient à des termes si éloignés que c’était un secours presque illusoire. La caisse des dépôts et consignations, engagée, aussi outre mesure, était surchargée d’actions de chemins de fer et de canaux.

Tous les ressorts, on le voit, étaient tendus. Le moindre événement survenant à l’improviste pouvait les briser. Depuis quelque temps on murmurait le mot de banqueroute ; la panique qui s’empara des esprits à la suite de la révolution de Février fit de ce mot le péril et l’épouvante du gouvernement républicain.

Non-seulement ce gouvernement héritait d’une situation très-compromise[2], mais encore il se voyait contraint, par son principe et par la circonstance qui le faisait sortir d’une révolution populaire, à se retrancher de ses propres mains des ressources considérables. En présence d’un milliard[3] instantanément exigible, d’un budget de 1 700 millions réglé avec un découvert probable de 76 millions sur les dépenses ordinaires et de 169 millions[4] sur l’extraordinaire ; en présence d’une dette inscrite de 4 milliards 395 millions[5], les réserves de l’amortissement étant absorbées jusqu’en 1855 ; en présence de travaux publics commencés

  1. Voir le rapport publié dans le Moniteur du 10 mars 1848.
  2. Le rapport de M. Ducos établit que la dépense totale surpassait le montant des recettes de 183 436 245 fr. (Moniteur, 26 avril 1849).
  3. 800 millions, selon M. Fould (Voir au Moniteur du 22 avril 1849).
  4. Voir le rapport de M. Ducos, Moniteur du 26 avril 1849.
  5. Le capital de la dette publique est évalué par M. Garnier-Pagès à 5 milliards, dette fondée et dette flottante, tout compris. M. Lacave-Laplagne, ancien ministre des finances de Louis-Philippe, accepte ce chiffre.