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HISTOIRE DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

commerce ne pouvait plus suffire aux frais de maison accrus dans une proportion qui dévorait les bénéfices. Les particuliers, entraînés dans une rivalité onéreuse de dépenses, vivaient d’expédients et d’anticipations. Tous les grands financiers prédisaient une catastrophe générale, si l’on ne parvenait au plus vite à rétablir le mouvement naturel de l’industrie et du commerce[1].

Du 1er janvier 1846 au 15 janvier 1847, la réserve de la Banque de France avait diminué dans une proportion considérable. Elle était descendue à 172 millions et se voyait fort menacée, quand l’empereur de Russie la releva momentanément, en se rendant acquéreur de rentes pour une valeur de 50 millions.

Suivant le rapport de la commission du budget sur les dépenses de 1847, les finances de l’État étaient engagées pour onze ans et les engagements pris ne pouvaient être éteints dans cet espace de temps qu’à la condition d’une paix ininterrompue et d’un budget ordinaire qui ne présentât plus aucun découvert ; c’était, en d’autres termes, supposer l’impossible[2]. Le gouvernement avait abusé de toutes

  1. Voir au Moniteur les discours de MM. Fould, Léon Faucher, Thiers, Bignon, à la Chambre des députés, pendant le mois de janvier 1848.
  2. Pour que les ressources cumulées de l’emprunt et des réserves de l’amortissement fussent suffisantes à la fin de 1855, il fallait les quatre conditions presque irréalisables que voici :
    1. Que les budgets ordinaires de 1848 à 1855 ne présentassent aucun excédant de dépenses sur les recettes ;
    2. Qu’aucun travail nouveau ne fût entrepris en dehors des travaux déjà votés et en cours d’exécution ;
    3. Qu’aucune circonstance intérieure ou extérieure ne détournât les réserves de l’amortissement de leur action exceptionnelle pour les rendre, par suite d’une baisse de fonds publics au-dessous du pair, à leur destination légale, le rachat de la dette ;
    4. Que la dette flottante pût être élevée, sans dommages pour le crédit public et sans préoccupations pour le trésor, à 735 millions en 1850, à 801 millions en 1851, et à 736 millions en 1852, pour être ramenée enfin au chiffre de 539 476 180 fr., à l’expiration de 1855 ; évidemment ces quatre conditions n’étaient pas admissibles. Voir, au Moniteur du 26 avril 1849, le rapport de M. Ducos au nom de la commission chargée d’examiner les comptes du gouvernement provisoire.