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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

martine. Un concert d’imprécations s’élève à cette nouvelle. D’un commun accord, on s’écrie qu’il n’y a plus à balancer ; le gouvernement provisoire doit être renversé sur l’heure. Aussitôt Blanqui dicte à l’un des siens une proclamation insurrectionnelle qui est immédiatement portée à l’imprimerie[1] ; après quoi on se donne rendez-vous pour sept heures du soir, sur la place du Palais de Justice, dans la salle publique appelée le Prado, et l’on convient de s’y rendre en armes, pour de là se porter sur l’Hôtel de Ville et intimer au gouvernement provisoire l’ultimatum de la révolution.

Alors Blanqui, resté seul, s’achemine vers la Préfecture de police afin de sonder les dispositions de Caussidière. Celui-ci était déjà fort irrité contre le gouvernement provisoire toutefois, il reçut les ouvertures de Blanqui avec froideur et ne parut aucunement disposé à servir un coup de main dont Ledru-Rollin et Louis Blanc auraient été victimes. Il y eut même, assure-t-on, une prise violente entre le nouveau préfet de police et le conspirateur, qui se quittèrent ennemis. Blanqui prit le chemin de l’Hôtel de Ville, voulant, avant de rien tenter, examiner par lui-même la position et juger par ses propres yeux des chances d’un coup de main.

Vraisemblablement, quoiqu’un assez grand nombre d’hommes à lui occupassent les postes intérieurs, il trouva des difficultés trop grandes à son entreprise. Peut-être même quelques furtives paroles lui donnèrent-elles l’espoir d’être à son tour, prochainement, par une voie moins périlleuse, introduit au sein du conseil. Quoi qu’il en soit, quand il rejoignit ses amis à la salle du Prado, où il se fit longtemps attendre, Blanqui n’était plus le même homme.

Depuis une heure environ, cinq à six cents sectionnaires, la plupart coiffés du bonnet rouge, tous armés jusqu’aux

  1. Voir aux Documents historiques à la fin du volume, n° 9.