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CHAPITRE XV

Le peuple maître de Paris.


Pendant que le gouvernement élu à la Chambre prenait avec hésitation les rênes du pouvoir et tâchait de se maintenir dans une sorte de légalité fictive, le comité de la Réforme s’emparait révolutionnairement des deux positions administratives les plus importantes : la Préfecture de police et la direction des postes. Après le combat du Château d’Eau et l’invasion des Tuileries, M. Étienne Arago, qui se rappelait la révolution de 1830 et qui savait comment se laissent chasser les fonctionnaires des royautés en déroute, se rendit à l’hôtel des postes. Il trouva la cour encombrée de gardes nationaux ; il leur annonça brièvement la fuite du roi, puis il se présenta dans le cabinet du directeur, M. Dejean. S’étant nommé, il lui déclara qu’il le destituait au nom de la République, et qu’il venait occuper sa place. M. Dejean resta interdit, balbutia, recommanda aux soins de M. Arago une vieille dame, sa parente, qui logeait chez lui, et quitta l’hôtel. M. Arago ne perdit pas une minute ; il rassembla autour de lui les employés et les somma, à leur grande surprise, de pourvoir pour l’heure accoutumée au départ régulier des malles-postes de la République. C’était chose malaisée ; car, entre l’Hôtel des postes et les barrières, il y avait, dans toutes les directions, plus de deux cents barricades à franchir. Cependant les employés, riva-