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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

« Puisse-t-il ressembler à son aïeul ! » s’exclame la reine.

Louis-Philippe la regarde d’un air de compassion.

On se hâte d’envoyer le papier encore humide au maréchal Gérard, afin qu’il le montre au peuple.

« Il est bien entendu, n’est-il pas vrai, sire, s’était écrit ; M. Crémieux, que madame la duchesse d’Orléans est régente ?

– Cela ne se peut, répondit le roi ; il y a une loi des Chambres. »

M. Crémieux n’entendit pas ou ne voulut pas entendre. Il descendit précipitamment dans la cour des Tuileries avec le général Gourgaud ; ils y répandirent tous deux le bruit de cette abdication qui trouvait encore beaucoup d’incrédules, et que l’on démentait déjà dans les salons les plus voisins du cabinet où elle venait d’être signée.

Pendant que ceci se passait au château, le combat continuait sur la place du Palais-Royal. À dix heures du matin, les gardes municipaux qui occupaient le poste du Château d’Eau, avaient été relevés par deux compagnies du 14e de ligne sous le commandement dés lieutenants Pères et Audouy.

Ce poste était un point stratégique très-important parce qu’il couvrait à la fois le Palais-Royal et les rues de Chartres, de Saint-Thomas du Louvre, du Musée, qui toutes débouchent sur le Carrousel. Aussi, dans sa constante prévision d’un soulèvement populaire, le gouvernement l’avait-il fait fortifier avec le plus grand soin.

Adossé à un massif de maisons faisant face au palais, le Château-d’Eau, construit au commencement du dix-huitième siècle, se composait d’une façade à deux étages, soutenue par quatre colonnes engagées, et de deux ailes latérales percées chacune de trois fenêtres. Un perron de quelques marches s’étendait, dans un développement de quarante mètres environ, sur toute la longueur de l’édifice, que terminait une terrasse entourée d’une balustrade en pierre sculptée. Au centre du premier étage, une niche