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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

de la cause de la liberté constitutionnelle, mais la honte du caractère et du droit de la nation ! Non, non, non, nous ne le pouvons pas, nous ne devons pas, ni en honneur, ni en conscience, l’accepter ! Le caractère, le droit, l’honneur de la nation ne sont pas à nous, ils sont au nom français ! Nous n’avons pas droit de transiger sur ce qui ne nous appartient pas !

« Messieurs, parlons de sang-froid, le moment le réclame. Le procès est imposant entre le gouvernement et nous. Sachons bien ce que nous voulons faire accomplir mardi à la France. Est-ce une sédition ? Non. Est-ce une révolution ? Non. Que Dieu en écarte le plus longtemps possible la nécessité pour notre pays ! Qu’est-ce donc ? Un acte de foi et de volonté nationale dans la toute-puissance du droit légal d’un grand pays ! La France, messieurs, a fait souvent, trop souvent, trop impétueusement peut-être, depuis cinquante ans, des actes révolutionnaires. Elle n’a pas fait encore un grand acte national de citoyens. C’est un acte de citoyens que nous voulons accomplir pour elle, un acte de résistance légale à ces actes arbitraires dont elle n’a pas su se défendre assez jusqu’ici par des moyens constitutionnels et sans armes autres que son attitude et sa volonté.

Des dangers ? n’en parlez pas tant, vous nous ôteriez le sang-froid nécessaire pour les prévenir, vous nous donneriez la tentation de les braver ! Il ne dépendra pas de nous de les écarter de cette manifestation par toutes les modérations, les réserves, les prudences d’actions et de paroles recommandées par votre comité. Le reste n’est plus dans nos mains, messieurs, le reste est dans les mains de Dieu ! Lui seul peut inspirer l’esprit d’ordre et de paix à ce peuple qui se pressera en foule pour assister à la manifestation pacifique et conservatrice de ses institutions ! Prions-le de donner ce signe de protection à la cause de la liberté et des progrès des peuples, et de prévenir toute collision funeste entre les citoyens en armes et les citoyens désarmés. Espérons, conjurons tous les citoyens qu’il en soit ainsi. Aban-