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HISTOIRE

rielle par une phrase qui demande, pour calmer les esprits et raffermir l’édifice politique, le concours universel des citoyens à la nomination des députés. Mais il ne parvient pas à se faire entendre ; la Chambre est impatiente de passer à la discussion sur l’amendement de M. Darblay. On pense que, s’il y a encore une conciliation possible, elle doit résulter de l’acceptation d’un amendement conçu en termes mixtes, de nature à rallier de part et d’autre les hommes prudents, avertis enfin par des signes manifestes que l’ouragan se rapproche.

« Si les agitations réformistes ont produit en quelques endroits des démonstrations hostiles à nos institutions et à nos lois, dit l’amendement de M. Darblay, elles ont aussi prouvé que l’immense majorité du pays, même dans les opinions dissidentes, leur est inviolablement attachée. »

Le parti conservateur attendait avec anxiété ce qu’allait faire l’opposition ; il espérait qu’elle saisirait cette occasion ou ce prétexte pour abandonner une lutte pleine de périls. Mais, soit que M. Odilon Barrot n’aperçût point encore tout le danger, soit que, vivement poussé par la presse radicale, il crût ne pouvoir reculer sans déshonneur, il déclare à la tribune que ni lui, ni ses amis, ne peuvent accepter l’amendement, parce qu’il consacre un principe que l’opposition repousse le droit de la majorité à porter un jugement sur la minorité.

M. Blanqui parait alors à la tribune. Au nom de son père le conventionnel, rappelant la cruelle et impolitique proscription des girondins par les montagnards, il conjure la majorité de ne pas abuser de la puissance du nombre en flétrissant une minorité dont le seul tort est de comprendre autrement qu’elle le dévouement envers la dynastie.

Le ministre des finances ayant essayé d’expliquer que les banquets devaient être considérés comme une attaque à la royauté et aux institutions monarchiques « C’est vous, s’écrie M. Barrot avec feu, c’est vous qui êtes hostiles à nos institutions et aveugles aux dangers de l’avenir ! » Ces