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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

genre avaient lieu à Rome et fournissaient à la faction des cardinaux des arguments contre la liberté dont l’esprit indécis et le caractère faible de Pie IX paraissaient très-troublés. Enfin Palerme s’était insurgée, et, après un bombardement de quarante-huit heures, le comte d’Aquila, renonçant à la réduire par la force, retournait auprès de son frère, le roi de Naples, et le décidait à faire des concessions.

C’est sous de tels auspices que s’ouvrait à la Chambre la discussion du paragraphe sur l’Italie. Les sympathies publiques étaient acquises à la cause italienne. M. de Lamartine leur prêta sa voix éloquente. Il accusa le gouvernement de s’être allié à tous les gouvernements absolus depuis sa rupture insensée avec l’Angleterre. « La France, entre vos mains, dit-il, en se tournant vers M. Guizot, devient gibeline à Rome et à Milan, sacerdotale à Berne, autrichienne en Piémont, et russe à Cracovie. Puis il développa, avec un grand bonheur d’expressions, cette opinion, qui était au fond l’opinion de la France. La réponse de M. Guizot ne fut point habile. En insistant sur la religieuse observation des traités de 1815, en risquant l’éloge du prince de Metternich, il ranima un moment les susceptibilités nationales de la Chambre, et provoqua sur les bancs de l’opposition de violents murmures. Mais, suivant sa coutume, il attendit avec un tranquille dédain que la rumeur fût calmée et prononça alors ces paroles mémorables : « Il ne s’agit pas du tout, à l’heure qu’il est, de constitution dans les États italiens. De quoi il s’agira dans dix ans, dans vingt ans, je l’ignore. Je ne suis pas obligé de traiter à cette tribune les questions que mes successeurs y traiteront. »

Le même jour, on apprenait à Paris que l’insurrection de Palerme repoussait toutes les concessions du roi de Naples ; la conséquence de ce refus était la promulgation d’une constitution, non-seulement à Naples, mais bientôt après à Florence, et l’insistance très-énergique des populations à Turin et à Rome pour en obtenir une semblable.