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PRÉFACE

pire, qu’elle a vu s’accomplir avant l’âge où elle eût été engagée d’honneur sous l’une ou l’autre bannière, la jeunesse, sans opinions préconçues, sans passions, mais aussi sans préjugés, cherche un enseignement pratique. N’étant point compromise encore par son passé, elle écoute les leçons de l’histoire. Elle interroge les hommes et les événements.

C’est de cette génération studieuse et impartiale que j’attends une appréciation définitive de l’Histoire de la Révolution de 1848.

Si, comme on semble le croire, nos espérances d’alors devaient la faire sourire ; si la générosité trompée d’un peuple qui croyait donner sa vie à la liberté, lui fournissait matière à raillerie ; si elle ne voulait tirer de nos crises révolutionnaires qu’une leçon de prudence égoïste ; si les grands pressentiments, ambigus ou manifestes, de ces temps agités ne lui causaient nulle émotion, j’aurais manqué mon but : mais je ne crains guère, je l’avoue, un semblable mécompte.

Malgré des différences très-sensibles dans l’inspiration et dans la discipline des esprits, on n’est pas, au déclin du dix-neuvième siècle, moins révolutionnaire qu’on ne le fut en ses commencements : on l’est seulement d’une autre manière.

La Révolution a quitté le monde souterrain des conjurations, des sociétés secrètes ; elle a cessé, dans