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CHAPITRE IV

Ouverture des Chambres. — Discussion de l’adresse à la Chambre des pairs.


Le jour de l’ouverture des Chambres approchait. Il fallait que le ministère prît un parti, qu’il se décidât nettement pour l’une ou l’autre politique la politique de la résistance ou celle des concessions, celle du progrès libéral ou celle de l’immobilité prétendue conservatrice. Se conformer à l’esprit des institutions constitutionnelles en cédant à l’opinion vraie du pays, ou bien s’en tenir à la lettre du gouvernement parlementaire en s’appuyant sur la légalité factice d’un vote servile, telle était l’alternative qui se posait devant le pouvoir. Elle ne parut pas douteuse aux deux hommes qui dirigeaient les conseils de Louis-Philippe. Tous deux, sans balancer, résolurent de ne prendre en aucune considération un vœu manifeste, et de retenir la France, malgré elle, dans un état de stagnation et de malaise moral dont il lui tardait de sortir. Les mobiles qui déterminaient M. Guizot et M. Duchâtel à prendre un parti aussi opposé aux doctrines qu’ils avaient professées toute leur vie étaient de diverses natures. Fatigué d’une lutte ingrate contre la probité publique, pressé de jouir, loin du tracas des affaires, d’une fortune considérable, M. Duchâtel, depuis quelque temps, sollicitait le roi d’agréer sa démission ; et, retenu à contre-cœur par des instances qui ressemblaient à des ordres, s’il inclinait de plus en plus vers une résistance opiniâtre, c’était autant par impatience