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DANTE ET GŒTHE.

tenaient de leur antique et noble origine le droit de faire des empereurs, et qui avaient restauré ce grand nom d’empire romain, le plus grand, dit Fauriel, qui eût été donné à des choses humaines ; dans les Deux Siciles, un royaume féodal, une dynastie florissante qui cherchait la gloire et la gaieté des lettres ; à Venise, une oligarchie opulente, et profonde déjà dans sa politique ; à Milan, une seigneurie nouvelle, tyrannique, mais remplie d’habileté ; à Florence enfin, une démocratie vive et hardie, exercée aux affaires par un gouvernement effectif et de courte durée, et chez qui s’éveillaient ces nobles curiosités dont la satisfaction allait prendre dans l’histoire le nom de Renaissance ; partout, sous l’action opposée des ambitions papales et impériales, des soulèvements, des ligues, des conjurations, des guerres civiles où se trempait dans le sang italien le tempérament italien ; des chocs violents d’où jaillissait la flamme d’un patriotisme exalté ; des haines sauvages, des vertus héroïques, tous les excès, tous les emportements d’une société sans règle et sans frein, où se produisaient aussi, par contraste, chez un grand nombre d’âmes, le dégoût des choses d’ici-bas, l’amour contemplatif, mystique et visionnaire des choses éternelles.

Les dissensions civiles ne faisaient pas de trêves sur les bords de l’Arno. Au dire des chroniqueurs, le sang étrusque de Fiesole et le sang romain de Florence n’avaient jamais pu ni se mêler ni s’accommoder. Fondée sous l’invocation du dieu Mars, qui devait à jamais la rendre inexpugnable, l’antique cité païenne