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XXXII

Machault, sans doute, ne méritait pas la mystification dont il avait été l’objet : mais sa persévérance était une faute ; il ne craignit pas de donner à sa folle passion le caractère de la ja- lousie (1). Ses plaintes prirent un caractère de reproches gue la conduite d’Agnès repoussait. Il les mettait en rondeaux et les lui envoyait.

En voici quelques-uns :

Se par amours n’amiez autrui ne moy, Ma grief dolour en seroit assez niendre ; Car espérance aroye en bonne foy, Se par amours n’amiez autrui De moy. Mais quant amer autre, et moy laissier voy, C’est pis que mort… (2).

Et ailleurs :

Pour Dieu, Dame, n’aimez autre que mi, Car par mafoyje n’airn autre que vous.

La fièvre qui troublait le poète ne se calmait pas, et parfois il allait jusqu’à se montrer jaloux des droits de Gaston Phébus.

Voici quelques-uns des vers imprudents qu’il fit sous cette folle impression d’esprit :

Las ! amours me soloit estre Douce, courtoise et po fière Et de ses dous biens repaistre Com vraie amoreuse mère. Or m’est sa grâce si chière Qu’en dolour me fait languir Et avoir toute griété Quant je voy autruy jouir De ce que jay tant amé (3).

Il fallut mettre un terme à ses importumtés. On lui interdit l’accès des lieux où vivait la comtesse de Foix. Force lui fut de

(1) Trop est cruetix li maulz de jalousie, p, 58.

(2) Œuores de G. de Machault, p. 53.

(3) P. 6’l.