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Flandre ? Cherchons parmi les héros des croisades : nous rencontrons, parmi nos compatriotes, les d’Ânglars, les Choiseul, les sires de Rocroy, le brave Baudouin du Bourg, Villehardouin, prince de Morée ; Gervais de Bazoches, prince de Tibériade ; Gauthier de Sainte-Ménéhould, maréchal de l’empire d’Orient ; Louis de Champagne, duc de Nicée, et cent autres ; pendant qu’en France les Conflans et les Châtillon obtiennent les premières charges du royaume. Alors nos comtes épousaient les filles des rois et mettaient les leurs sur le trône de France. Alors, dans notre province, la gloire, le bonheur, le mouvement étaient partout ; la Champagne était tête de colonne, et nos hommes de lettres, comme nos hommes d’armes, pouvaient fièrement répéter ce vieux cri de guerre, si connu dans nos contrées : « Pass’avant ! au comte ! pass’avant ! »

Voilà, ce que les comtes de Brie et de Champagne avaient fait de leurs domaines ; et les femmes de leur race et celles qu’ils avaient prises pour compagnes avaient noblement accepté leur part dans la grande tâche qu’ils avaient entreprise.

Adèle, épouse du comte Etienne Henri, mort en 1201, aimait les belles-lettres et protégeait les poètes et les doctes écrivains. Hugues de Sainte-Marie lui dédiait ses œuvres.

Alix de Champagne, fille de Thibault le Grand, troisième femme de Louis VII, cultivait les muses et les arts ; elle donnait des pensions aux gens de lettres, aux musiciens. La mémoire de ses charmes, de ses vertus et de sa brillante intelligence a traversé les âges.

C’est au milieu de ces nobles traditions que se passa la jeunesse d’Agnès de Navarre. Ces exemples de famille lui servirent d’enseignements et développèrent chez elle une imagination active et brillante. Elle suivait ses parents à la cour de France : son éducation devait s’y perfectionner. Le palais des Valois était ouvert aux gens de lettres, aux artistes ; la monarchie gagnait en éclat tout ce que perdait la féodalité, et l’élite de la nation déjà se réunissait autour d’elle.

Le XIVe siècle fut loin de compter autant de trouvères que les âges précédents ; les malheurs de nos guerres avec l’Anglais arrêtèrent la marche de la littérature et les progrès de la civilisation. Quelques poètes cependant apparaissaient çà et là, et chantaient l’Amour que Mars ne fait jamais fuir. À leur tête était un gentilhomme de Brie, Guillaume de