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(5), Agnès était sous la tutelle de sa mère et de son frère aîné Charles, roi de Navarre. Sans doute elle parle d’un voyage qu’on lui impose, et qui dérange les projets amoureux du poète.

(6) Voici le rondeau que Machault écrivit après le voyage de Saint-Denis ; on voit que l’élève passe déjà le maître :

    Toute belle, vous m’avez visité ;
    Très-doucement, dont cent fois vous mercy :
    De très-bon cuer et par vraie amisté,
    Toute belle, vous m’avez visité.
    Et avec ce vous en avés pité.
    Pour conforter mon cuer taint et nercy :
    Toute belle, vous m’avez visité
    Très-doucement, dont cent fois vous mercy.

(7) Ce rondeau fut-il sérieusement inspiré par le pauvre Ma- chault, borgne et goutteux ?

(8) Agnès sacrifie ici au mauvais goût de son temps. Son maître abusa plus d’une fois du jeu de mots ; voici un exemple de son savoir faire en ce genre :

Douce dame, tant com vivray.
Sera mes cuers à vos devis :
Car mis en vos las mon vivre ay,
Douce dame, tant com vivray.
Par un doux regart que vi vray,
Naiscent de vos gracieux vis,
Douce dame, tant com vivray,
Sera mes cuers à vos devis.

(9) Ce rondeau et le précédent furent composés alors que la jeune princesse cherchait à perpétuer le rêve de Machault, enfin éclairé par le bon sens et l’amitié.

(10) Ce rondeau énigmatique est encore dû aux leçons de Machault ; ses œuvres sont remplies de ces désignations en chiffres, de cette galanterie arithmétique. Aussi, dans une de ses dernières lettres, Agnès, en lui envoyant ces vers, lui dit : « Mon très doulz cuer, je vous envoie un rondelet ou vostre nom est. Si vous pri très amoureusement que vous le veuilliez penre en gré ; car je ne le sceusse faire se il ne venist de vous. » Les numéros du premier vers sont ceux des lettres de l’alphabet nécessaires pour composer le nom de Guillaume : E. G. M. A. I. L. U.