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que la neige a pris quelque consistance[1] ». Il est bien plus naturel d’admettre que ces crevasses se sont recouvertes d’un toit de neige par le seul effet de leur force d’adhérence ; car il n’est pas rare de rencontrer dans les Alpes des parois de neige qui surplombent de cinq à six pieds et même davantage le rocher sur lequel elles reposent. Il me semble au contraire que si la crevasse était survenue ou s’était élargie postérieurement à la chute de la neige, comme le veut de Saussure, celle-ci devrait être fissurée ou s’être enfoncée.

Dans les glaciers simples les crevasses s’étendent souvent sur toute la largeur du glacier ; mais elles sont en général moins larges au milieu que sur les bords. Il n’en est pas de même des glaciers composés. Lorsqu’ils ne sont pas confondus par un long trajet, il peut arriver que leurs crevasses ne correspondent en aucune manière. Le glacier de Zermatt pourra encore ici nous servir d’exemple. L’affluent de la porte blanche et en partie celui du Gornerhorn sont régulièrement sillonnés de crevasses ; tandis que l’affluent du Mont-Rose en a bien moins et de bien moins régulières[2]

  1. De Saussure. Voyage dans les Alpes. Tom. II, p. 70.
  2. Il suffirait de ce seul fait pour renverser toute la théorie de M. Godeffroy du mouvement des glaciers et de la formation des moraines, alors même que l’observation directe ne nous aurait pas appris comment ces phénomènes se passent.