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Or, un des droits les plus sacrés que la Charte, dans ses articles fondamentaux, garantit aux Français sans exception, est la liberté individuelle.

Art. 4. « Nul ne peut être poursuivi, ni arrêté, que dans les cas prévus par la loi et dans la forme qu’elle prescrit. »

Ce droit, si cher à l’homme libre, appartient à l’habitant des colonies comme à celui de la métropole ; le caprice et l’arbitraire ne peuvent pas plus séquestrer les personnes à la Pointe-à-Pitre qu’à Paris.

Pour contester l’application des principes ci-dessus voudrait-on argumenter de l’article 75 de la Charte même ?

« Les colonies seront régies par des lois et des réglemens particuliers. »

Quelle conséquence à tirer de cette disposition, et que prouve-t-elle ?

Voici, à ce qu’il semble, la pensée qui l’a dictée.

Toute législation, pour être bonne, doit être appropriée aux besoins de ceux qu’elle doit gouverner ; et pour cela il faut la combiner avec leurs mœurs, leurs habitudes et même leur climat ; les principes immuables de la justice et de l’équité en seront toujours et partout la base ; mais il y aura des modifications dans les détails et des différences dans l’application. Les mœurs des colonies ne sont pas les nôtres, non plus que leur climat et leurs habitudes ; dès-lors on a pu penser et avec raison qu’il leur fallait une législation particulière.

En conséquence on peut dire que les Français colons sont hors les lois communes aux Français de la métropole ; mais on ne peut pas dire qu’ils sont hors de toute la Charte, et que la déclaration du droit public des Français n’a pas été faite pour eux ; il faut donc, admettre que leur liberté individuelle leur a été garantie, et qu’on ne peut y porter atteinte que dans les cas et dans les formes déterminés par la loi.

Ce qui précède conduit à la solution de la question