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pas exister légalement, et n’est aussi fondée non plus sur aucune loi.

Si, contre le vœu du plus auguste monument de notre ancien droit public, la loi salique, qui veut que les « Français soient juges les uns des autres[1] ; » contre tous les capitulaires[2] qui proscrivent les ordres arbitraires donnés sans procédures préalables, sans conviction de la culpabilité du prévenu, « en sorte que l’accusé ne puisse nier le crime, et que la loi ne soit pas violée par le poids de la puissance[3] ; » contre les déclarations de nos premiers rois, qui frappaient de nullité tous les actes de leur autorité contraires aux lois[4] ; contre tous les anciens fastes de la nation qui lui assurent le privilége de ne pouvoir être même emprisonné, ce qui est bien moins que d’être déporté, sous quelque prétexte que ce soit, à moins de crime notoire ; contre le droit naturel auquel toutes les lois positives sont seules subordonnées ; contre le droit public exprimé dans la Charte, il était possible de reconnaître une haute police ayant le pouvoir de déporter sans jugement, par mesure administrative, une telle dictature sur les personnes serait nécessairement limitée et réformable dans ses écarts.

La puissance de retrancher de la société coloniale l’individu soupçonné d’en troubler la paix publique ne doit produire que des actes essentiellement provisoires. Ceux qu’elle atteint ne sont que soupçonnés ;

  1. Pactum legis salicæ. Voyez Baluze.
  2. Voyez Baluze.
  3. Non nunquam gravedo potestatis depravare solet justitiam sanctionis. L. des Visigoths.
  4. Si quis auctoritatem nostram subreptice contra legem elicuerit fallendo principem, non valebit. V. cap. de Clotaire I en 560, Baluze, T. I, fol. 7, n° 5. Quidquid legibus decernitur omnibus contra impetrandi aliquid licentia derogatur, quæ si quolibet impetrata fuerit vel obtenta, a judicibus repudiata inanis habealur et vacua. — Idem.