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tion de l’art. 75 de la Charte, promet la continuation des travaux pour la mise en activité des Codes français dans les colonies ; et par anticipation, elle oblige les Cours royales remplaçant les conseils supérieurs à motiver leurs arrêts. Cette ordonnance renferme nécessairement un principe incompatible avec le pouvoir de déporter administrativement sans jugement. Il ne peut y avoir de Codes de lois dans les colonies, s’il y a un pouvoir arbitraire de déportation. Le principal objet des Codes est la jouissance des droits civils. La déportation arbitraire qui enlève cette jouissance ne peut co-exister avec des Codes qui la protègent. Le législateur qui dirait à son peuple : « Je vous promets des Codes pour protéger vos personnes et vos propriétés ; mais j’établirai des agens qui enlèveront vos personnes à leur gré, pour les déporter où il leur plaira, et aussi long-temps qu’ils le voudront, » ferait une promesse de la plus amère dérision. Jamais les modifications dont les Codes promis sont susceptibles à raison des différences locales ne peuvent en détruire l’essence qui est de respecter le droit naturel et le droit public, qui garantissent la première de toutes les propriétés, celle des personnes.

Assurément la Charte n’a pas inscrit les colonies dans l’art. 70 pour les mettre entièrement hors du droit public de France, dont elles sont une partie intégrante d’après la loi du 1er mars 1790. L’ordonnance du 22 novembre 1819 n’a pas permis non plus l’introduction des Codes français pour maintenir ou constituer dans les colonies un pouvoir arbitraire destructeur de la propriété des personnes, base essentielle de ces Codes.

Ainsi se trouve résolue négativement la première question de savoir si le réglement du 10 septembre 1817 a force de loi, et s’il donne le pouvoir de déporter sans jugement.

Ce règlement, émané du ministre seul, ne peut être