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ZOROASTRE

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tain niveau, l’homme possède ce qu’on appelle des pouvoirs. Ces pouvoirs sont divers… tel lit dans les cœurs, cet autre est clairvoyant, celui-ci guérit par l’imposition des mains, un autre éteint un incendie par son geste et sa prière ; celui-là pourrait sans danger s’asseoir auprès d’un tigre affamé… Néanmoins je n’insisterai pas, parce que notre Occident pcrsiQe tout ce qui le dépasse, et parce que personnellement je n’ai pas de preuve et je doute jusqu'à nouvel ordre. » (Sage, op. cit., p. 85).

Les contradictions de ce texte, et ses rélicences, montrent le peu de sécurité qu’inspire le yoghisme à ses propres docteurs. Vue du dehors, la doctrine est encore plus compromise par la variété de ses éléments.

Les historiens les plus autorisés du yoghisme ont noté la multiplicité des affluents (Garbb, Sâmkhya und Yoga, Grundriss der Indo-Arischen Philologie, Strasbourg, 1896, pp. 34, 36, 43 sq.) qui ont altéré

en le grossissant le flot peut-être pur à sa source, mais insignifiant, du fonds bouddhique (Sknart, Houddhisme et Yoga, 1900, pp. 3-/|.) — C’est à ces emprunts disparates qu’est dû le succès d’un éclectisme si peu convaincant : celle « théosophie » anonyme, riche d'éléments suspects que la qualification d’anglo-hindoue suffit à classer, n’est, de l’aveu de ses « apôtres », le fruit « d’aucune des six grandes écoles de l’Inde antique, mais plutôt une synthèse… avec des éliminations et des additions » (D. A. Courmes, Avant-Propos, p. 3 ; — texte, p. 61). Sous ces euphémismes, il nous est loisible de reconnaître un vin frelaté ou tout au plus un laborieux coupage, indigne de se comparer à la pure essence de la Vérité.

Robert van der Elst, Docteur es Lettres, Docteur en Médecine.

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ZOROASTRE. — D’après les Grecs et les Latins, Zoroaslre a écrit des ouvrages d’astrologie, de magie, de présages et pronostics, de médecine, dont il nous reste de courts fragments ; il aurait vécu plus de six mille ans avant notre ère. D’après les Parsis et les Guèbres de la Perse et de l’Inde, successeurs des Persans mazdéens et des mages, Zarathushthra, fils de Pourushaspa, descendant de Spitama, a écrit l’Avesta et a fondé le culte du feu ; il aurail vécu de six à sept cents ans avant notre ère. Les fragments conservés en grec n’ont d’ailleurs rien de commun avec l’Avesta. — Dès le début de notre ère, on a identifié ces deux personnages ; Pline cependant se demandait déjà s’il u’y avait pas eu deux hommes du nom de Zoroastre et il leur adjoignait encore Zaratus, qui est notre Zarathushthra.

Les opinions les plus diverses ont été émises et soutenues ; aussi on a écrit' : « Zoroastre est-il un personnage légendaire ou a-t-il vraiment existé?… Date, patrie, lieu de sa prédication, autant de questions passionnantes et presque insolubles ». Conférence faite au Musée Guimet, 1908, p. a31 (RM. de vulg., t. XXX).

On peut chercher à concilier les diverses traditions en supposant d’une part que le nom d’un Zoroastre. plus- ou moins légendaire, a été associé par les Grecs et certains Syriens à l’astrologie, à la la magie et au culte du feu, comme ils l’ont fait en diverses mesures pour Pétosiris, Osthanès, Hermès Trismégiste, Prométhée, Yônitos fils de Noé, et, d’autre part, qu’au vie siècle avant notre ère, sous Hystaspe, père de Darius I"", un certain Zarathushthra (Zaratus, Zoroastre), fils de Pourushaspa, a réformé la religion des Mages, comme un autre Zaratus(Zoroastre), fils de Choragan, a voulu le faire encore (avec Mazdak) au vi° siècle de notre ère. Dans cette hypothèse, le fils de Pourushaspa, qui aurait vécu 77 ans, serait originaire du pays d’Ourmiah, se serait instruit dans l’Inde, aurait converti un roi de Bactriane et aurait dogmatisé dans toute la moyenne Asie ; de sorte que certains Grecs en ont fait un maître de Pythagore et que certains Syriens l’ont mis en relation avec les Israélites durant la captivité de Babylone, et ont même été parfois jusqu'à le supposer disciple du prophète Jcrémie.

On peut au contraire négliger la tradition mazdéenne, qui semble très récente, et s’en tenir à l'élude intrinsèque de l’Avesta (faits, idées et langue),

pour en augurer l'époque à laquelle pouvait vivre son auteur. On en est arrivé, dans cet ordre d’idées, aux résultats les plus divergents : certains le plaçaient un millier d’années, sinon plus, avant notre ère, tandis que quelques-uns regardaient son ouvrage, l’Avesta, comme un apocryphe rédigé par les Parsis après la conquête arabe. On peut s’en tenir ici à la solution intermédiaire, donnée ci-deasus à l’article Iran (Religion dkl'), par leR. P. Lagranob : l’auteur de l’Avesta serait inconnu. Ce serait u.i grand esprit créateur, qui aurait caché son nom et se serait couvert de l’autorité vénérée du légendaire Zoroastre, pour accréditer l’Avesta, vers l’an 150 avant notre ère, au temps où Mithridate le Grand anéantissait la puissance grecque dans le territoire persan. C'était d’ailleurs l'époque des pseudépigraphes, celle du Livre d’Hénoch et des Sibylles. Cf. Revue Riblique, 1904, p. 45. Pour le R. P. Lagrange, il n’y a donc qu’un seul Zoroastre, celui des Grecs, patron des astrologues et des magiciens, que les Constitutions Apostoliques identifient même avec Nemrod.

La question de la personnalité de Zoroastre et de la date du premier Avesta est d’ailleurs devenue assez secondaire, car un texte syriaque, inutilisé jusqu’ici, nous a appris que notre Avesta n'était pas écrit au début du vie siècle de notre ère ; il était conservé de mémoire par les prêtres mazdéens (mobeds) et enseigné de bouche à bouche dans les écoles, comme l’ont été chez nous la religion et toutes les sciences des Druides. Mahomet, qui connaissait bien les Mages, ne les a pas mis au nombre des « gens du Livre », parce qu’ils n’avaient pas encore de livre religieux. C’est sous le dernier roi sassanide, Yezdegerd III (632 à 652), lorsque les rapides succès des musulmans ont fait craindre l'évanouissement de l’empire perse et de sa religion, qu’un gouverneur intelligent a réuni les plus vieux mobeds des diverses provinces « qui ont récité devant lui l’un après l’autre les traditions des rois et les vicissitudes du monde ». Dans leurs récitations mises ainsi bout à bout, on a découpé soit l’histoire légendaire de la Perse, soit notre. Avesta, ainsi que d’autres ouvrages perdus.

Cette reconstitution du code religieux des Mazdéens (Avesta), par voie de récitation avec additions et suppressions, semble avoir été faite plusieurs fois, d’abord par Tansar, vers 226, sous le premier roi sassanide Ardaschir, puis par Adarpad, sous Sapor II,