Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 4.djvu/992

Cette page n’a pas encore été corrigée

1971

VULGATE LATINE ET S. JÉRÔME

1972

dant toute version Adèle y participe, précisément parce qu’elle est conforme à l’original. On dit d’une version qu’elle est authentique, non pas pour la rattacher par ce terme à un auteur déterminé, par exemple à S. Jérôme ; mais pour attester sa conformité avec le texte dont elle est la traduction. Son authenticité peut être interne ou externe. L’authencité interne n’est rien d’autre que la fidélité même de la version, qui se révèle scientiliquement par l'étude. Cette connaissance reste d’ordre privé et n’est susceptible que d’une certitude purement humaine. Quand l’authenticité d’une version est déclarée par l’autorité compétente, elle devient externe, publique et d’ordre juridique, autant vaut dire « oflicielle ». Le législateur ou le magistrat suprême peuvent conférera une copie notariée l’autorité même qui convient à l’original même d’un texte, d’un testament par exemple ; et dès lors la copie fait foi. Telle est la prérogative conférée à la Vulgate latine par l’Eglise. Par voie d’autorité, elle a décrété qu’on la tiendra pour « authentique » et en prescrit l’usage dans tous les actes publics du magistère ecclésiastique, ordinaire et extraordinaire. L’Eglise avait le droit de recourir à pareille décision. Gardienne et maîtresse des Ecritures divines, elle se trouverait dans l’impossibilité de remplir son mandat, s’il n'était pas en son pouvoir de discerner avec certitude les textes(originaux ou versions) qui contiennent réellement la parole de Dieu. Certes, la conservation inaltérée d’un texte, fût-il sacré, et, pareillement, la conformité d’une version avec le texte original, ne sont pas l’objet d’une révélation divine ; mais elles peuvent devenir un fait dogmatique, sur lequel, en certains cas, l’Eglise a le droit ou même le devoir de se prononcer.

C’est là un point de départ sur lequel tous les catholiques sont d’accord ; s’ils se sont divisés au sujet du sens et de la portée du décret du Concile de Trente sur l’authenticité de la Vulgate, c’est surtout parce que, jusqu'à ces derniers temps, le texte de ce décret restait déraciné de son contexte. La publication qu’on vient de faire des Actes du Concile a jeté sur toute la question tant de lumière que la controverse reste bien réduite, sinon complètement abolie. Ce n’est pas que ces documents historiques fassent partie de la définition conciliaire, mais ils aident à la comprendre. Si l’exégèse de l’Ecriture elle-même relève del’herméneutiquerationnelle, il en va de même, et à plus forte raison, des définitions et des lois de l’Eglise.

Jusqu’au temps du cardinal Franzelin inclusivement (f 1 886), on ne lisait l’histoire du Concile de Trente que dans fra Paolo Sarpi (1619), ou dans Pallavicini (1656). Le premier, théologien de la République de Venise, était luthérien d*esprit et adversaire déclaré de la souveraineté pontificale. Le second a écrit lui-même de son ouvrage, au lendemain de la publication : « Mon histoire est mêlée d’apologie, ou, pour dire vrai, c’est plutôt une apologie mêlée d’histoire. » (Lettre au marquis de Durrazo, 1657). Au siècle suivant (1787), Jossb Le Plat publie ses Monumenla ad kistoriam Concilii Tridentini, ouvrage utile, mais insuffisant. Aujourd’hui, nous avons les Actes authentiques du Concile de fiente, édités, pour la première fois, en 1874 par l’oratorien Thbinkii ; mais pour des raisons qui tiennent aux circonstances dans lesquelles se fit cette publication, le texte original, gardé aux archives du Vatican, n’avait pas été transcrit intégralement, ni même avec assez de soin. La lacune vient d être comblée par la publication du Conciliant JridentiRtun, entreprise par la « Goerresgesellschaft. « Dans cette collection, Mbrklb (vol. I paru en 1901) et

Ehsbs (vol. V paru en 191 1) ont publié les documents qui concernent la sess. iv du concile : diaires, projets, amendements, discussions, votes motivés, décrets. A ces sources il faut ajouter la correspondance échangée entre' les Légats pontificaux présidant le Concile à Trente, et les cardinaux faisant partie de la Commission romaine, nommée par Paul III, pour préparer les décrets à soumettre aux délibérations du Concile, et les revoir ensuite avant la promulgation pontificale. Ces lettres ont été publiées en 1 864 par le barnabite Vbrcellonb dans les Dissertazioni accademiche (Dissert., IV), et la même année traduites en français dans les Anale c ta jurispontificii, sept.-oct., p. loao. Plus tard (1897), ces lettres ont été publiées plus complètement par DnuFFEL-BnANDi, Monumenta Tridentina, fasc. 4 » Munich ; et plus récemment encore par la Goerresgesellschaft, Concilium Tridentinum, t. X. M. Didiot en avait reproduit de larges extraits dans la Revue des Sciences ecclésiastiques, t. LIX, p. 48 1 ; cf., du même auteur, Logique surnaturelle et subjective, thèse xxxi 1 1.

L’histoire des controverses au sujet de la Vulgate, même entre catholiques, se lit dans toutes les Introductions générales à l’Ecriture sainte, ou encore dans la plupart des traités de Théologie fondamentale. Pour éviter des redites inutiles, nous nous bornons ici à préciser l'état actuel de la question, en distinguant les points acquis d’avec les opinions encore en présence.

i° a) Le décret publié le 8 avril 1546 par le Concile de Trente, Sess. iv, D. B., 787(669), et commençant par le mot Sacrosancta, est certainement dogmatique.il a pour objet le Canon des Saintes Ecritures (voir ce mot). Après l'énumération des livres dont se composent l’Ancien et le Nouveau Testament, vient un canon : « Si quelqu’un ne reçoit pas pour sacrés et canoniques ces mêmes livres en entier, avec toutes leursparties (cum omnibus suis partibus), tels qu’on a coutume de les lire dans l’Eglise catholique, et qu’ils sont dans l’ancienne édition latine de la Vulgate…, qu’il soit anathème. »

Que veulent dire les mots cum omnibus suis partibus ?Dans son traité De divina Tradilione et Scriplura, dont la première édition est antérieure à la publication des Actes du Concile par Theiner, le futur cardinal Franzelin entend par partes (qu’il distingue des particulae) les passages directement dogmatiques (o. c., 3 c édit. Rome, 1882, p. 527-540). Le P. Vbrcellonb, Sulla authenticità délie singole parti délia Bibbia, Rome 1866 (traduit en français dans la Revue cath. de Louvain, 1866 et 1867), l’avait entendu des portions dites deutérocanoniques de l’A. T. L’incise en question ne figurait pas dans la première rédaction du décret, elle y fut introduite pour donner quelque apaisement à des membres du Concile, qui eussent voulu qu’on mentionnât expressément dans le décret trois passages des Evangiles (Me, xvi, 9-20 ; Lc, xxii, 43, 44>'o., vii, 53-vm, 13), dont l’authenticité était contestée non seulement par Erasme, mais aussi par divers catholiques. Comme le card. Pacheco, évêque de Jæn, insistait dans ce sens, on vota ; et par 35 voix contre 17, il fut décidé négativement ;

« parce que, disent les Actes, on ne veut rien faire

de plus que le concile de Florence ». Tubiner, I, 71-77 ; Mbrklb, I, 38. D’où il suit que l’incise cum omnibus suis partibus insiste seulement sur l’intégrité plénière du Canon, sans rien ajouter aux mots qui précèdent : libros ipsos integros. Tel est le sentiment, à quelques nuances près, de Vacant, Bainvbl, Didiot, van Noort, PnAT, Huby, Mangbnot,