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VULGATE LATINE ET S. JEROME

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volontiers dans ses Commentaires. C’està cette même t époque qu’il convient de placer la double traduction, grecque et latine, de l’Evangile selon les Hébreux, trouvé par lui chez les Ebionites ou Nazaréens de Bérée (Alcp), proche de la solitude de Chalcis. Dix ans plus tard, le traducteur rencontrera un autre exemplaire du même ouvrage dans la bibliothèque de Césarée en Palestine. De vir. inlustr., iii, P. /.., XXI II, 61 3.

Ayant appris que Grégoire de Nazianze venait d’être installé sur le siège de Constanlinople (380), Jérôme, que rien ne retenait plus en Syrie, partit pour la nouvelle Rome. Epris de l’éloquence et du sa voir du grand évêque, il résolut de continuer, sous sa direction, ses études bibliques. Le « théologien » satisfit pleinement son disciple « assidu et curieux ». Grégoire devait rester pour Jérôme le maître par excellence : « Præccplor meus », écrira-t-il. De vir. inl., uxvm, P. I.., XXIII, 707 ; et souvent ailleurs.

A l’occasion du concile tenu à Constanlinople en 081, qui réunit plus de cent cinquante évêques, il eut l’avantage de se rencontrer avec S. Grégoire de "Nysse, dont il garda un souvenir plein d’estime. Dès lors, Jérôme avait à cœur d’enrichir les Latins, ses congénères, des trésors que les écrivains ecclésiastiques de langue grecque avaient accumulés en Orient. Il traduisit la Chronique d’Eusebe, en la complétant par des additions, surtout par le supplément, qui va de 325 à la mort de l’empereur Valons (378). Sa traduction de trente-sept homélies d’Origène sur Jérémie, Ezéchiel et Isaïe, date de cette époque. II y joignit un essai d’exégèse personnelle sur la vision des Séraphins (Isaïe, vi), qu’il lut à Grégoire de Nazianze. (Epist., xviii, n. 17-21, et Comm. in Isaiam, P.L., XXIV, 91-92).

c) L’année suivante, le moine itinérant part pour Home, où doit se tenir un concile, dans lequel on examinera la question du schisme d’Antioche (38a). Peut-être même Util roule avec Epiphane, l’évêque de Salamine, et Paulin, celui des trois prétendants au siège épiscopal quia ses préférences. On peut conjecturer qu’il prit une part active au synode, étant donnée l’estime que le pape Damase conçut aussitôt pour son savoir. Le concile fini, au printemps de 383, le vieux pontife le retint en qualité de secrétaire du Siège Apostolique^/jisf^cxxi 1 1, n. 16 ; P.L., XXII, io52 ; cf. P. G., XVII, 629). Il recourt souvent à sa science des Ecritures (Epist., xix, xx, xxi, xxxv, xxxvi ; P.L., XXII, 376-3(/, , 451-461). La faveur dont Jérôme jouit alors fera plus tard l’objet d’une légende, celle de son cardinalat. L’invention ne saurait être antérieure nu dernier quart du vi c siècle. Cf. Cavallkra, o.l, II, 1 40-i 44 Stimulé par les encouragements et même les aimables reproches de Damase, Jérôme reprend son étude de l’hébreu, et se met en relation avec les Juifs de Home. Il obtient même de l’un d’entre eux communication d’un assez grand nombre de livres, appartenant à la synagogue. L’emprunteur a raconté lui-même au pape l’incident, pour s’excuser de faire attendre la réponse aux questions qui lui avaient été posées. « Voici, me dit le Juif complaisant, ce que tu m’as demandé. J’hésitais et ne savais que faire ; mais par sa hâte (car il avait promis de rapporter au plus tôt les livres empruntés), il m’a tellement terrifié que, laissant là tout le reste, je me suis mis a les transcrire ; et c’est ce que je fuis main tenant encore.)’(Epist., xxxvi, n. 1, ad Damas., PL., XXII, f t ï>2). Quels pouvaient bren être ces livres ? Une autre lettre, écrite vers cette même époque quil. 384), complète assez bien la précédente. Pour explique* à Marcella le laconisme d’une de ses lettres, Jérôme lui confie qu’il est engagé dans

un travail pressant. & II y a déjà assez longtemps, écrit-il, que je compare avec les manuscrits hébreux l’édition (grecque") d’Aquila, pour voir si, par haine du Christ, la Synagogue n’y a point fail de changements. Puisque je parle à une personne amie, j’avouerai que j’ai fait plus d’une trouvaille utile pour la confirmation de notre foi. Déjà les Prophètes, Salomon, le Psautier, les livres des Rois ont été soigneusement passés au crible. Présentement je m’occupe de l’Exode, que les Juifs appellent Elle s mot h. Je vais aborder le Lévitique. » (Epist., xxxi.n.i ; P.L., XXII, 44*3). Ce travail de vérification d’un texte grec d’après la Bible hébraïque ne dépasse pas la compétence de Jérôme à ce moment de sa vie, et répond bien à ses préoccupations.

Ce fut pendant son séjour à Rome (383-384) qu’il entreprit, à la demande du pape, de reviser d’après le grec la version latine des Psaumes et des Evangiles. Le Psautier latin, revisé alors sur la version grecque des Scptante(/ ; ce< carsimet ma gha ex parte, écrira-t-il lui-même six ans plus tard, Præf. in tibr. Ps., P. L., XXIX, 117), sera usité en Italie jusqu’à la Qn du xvi 8 siècle. On l’appelle le « Psautier romain », pour le distinguer d’une recension ultérieure. La recension des Evangiles devait avoir une fortune plus durable, puisqu’elle figure aujourd’hui encore dans notre Vulgate. La lettre-préface, A’ovum opus, qui les accompagne, à l’adresse du pape Damase, est un document précieux à bien des égards ; et nous aurons à le citer plus d’une fois au cours de cette étude. CÇ.P./.., XXIX, 5a5-530. L’entreprise de Jérôme n’avait rien d’officiel, et son œuvre s’imposa d’abord d’elle-même : par sa valeur, et aussi par l’autorité croissante que lui conférait l’usage, au fur et à mesure qu’elle se répandait. Les approbations positives de l’Eglise ne devaient venir que beaucoup plus tard.

La revision s’étendit-elle au Nouveau Testament tout entier ? C’est une question controversée. On peut tenir pour l’affirmative, mais en accordant que les retouches ont été, à partir des Actes, peu nombreuses et moins profondes. Cf. Alf. Duhand, Recherches de Science religieuse, oct.-déc, 1916, 1531-54g ; Ferd. Cavalleha, dans Bulletin de littér. ecclés. de Toulouse, 1920, 270-292.

L’activité du nouveau maître es choses bibliques s’étendit encore à l’élite de la société romaine. On vit se réunir sur l’Aventiû, dans la noble maison de Marcella, des patriciennes, matrones et jeunes filles, telles que Paula, Eustochium, Asella, Albina, Blesilla, pour écouter les leçons de Jérôme sur le texte sacré, lu dans sa langue originale, grecque ou hébraïque. Tant de succès ne pouvait manquer d’éveiller la jalousie et même de provoquer la détraction. C’est de ce moment que datent les oppositions que Jérôme rencontrera dans le clergé romain. Mgr Duckbsnb, Hist. anc. de l’Eglise, II, 481, fait observer que « ce n’était pas seulement pour ses qualités qu’on lui en voulait ». Certes, le Dalmate avait des défauts, et il n’a jamais songea les dissimuler. D’humeur batailleuse, il rend avec usure les coups qu’on lui a portés. Mais ici il faut savoir faire aux mœurs littéraires du temps la part qui convient. Le P. Cavallera, o. I., I, 113-120, 193-220, a raison d’y insister. Jérôme est un rhéteur achevé, il connaît tous les topiques de l’amplification oratoire. Son goûl pour les mots heureux et la sonorité de la phrase l’a entraîné plus d’une fois au delà des bornes, mais ses premiers lecteurs savaient faire la part du « style ». A son irascibilité naturelle, le saint joignait un amour de Dieu et du Christ, qui se révèle tout entier dans la finale de la lettre xxu*, à Eustochium, sur la virgini’. é. « Tout ce que j’ai exposé paraîtra dur à celle