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TRANSFORMISME

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dire de lui comme d’un édifice où se reconnaissent les slvles de différentes époques, ce membre pentadactyle date du Dévonien, ce type triangulaire de dents et peut-être ce développement du cerveau remonte au Crétacé, ce quatrième tubercule accessoire aux molaires supérieures a été introduit au commencement de l’Eocène, cette grande taille a été atteinte au Miocène, ce menton n’apparaît qu’à la fin du Quaternaire. Quelque chose de contrôlable et de desciiptible rejoint assurément les divers stades par lesquels la figure de notre corps a été graduellement réalisée. Nous ne comprenons pas encore très bien la nature de ce lien physique, mais son existence est d’ores et déjà dém ntré -, et les paléontologistes sauront bien un jour, lui donner un nom. (Revue de Philosophie. 1923, p. 171).

Et ailleurs, après avoir rappelé comment l’homme ne fait suite exactement à rien de connu, le P. Teilhard montre comment il relaie admirablement les efforts antérieurs de la vie :

Comment ne pas admirer avec quel « naturel », morphologiquement et chronologiquement, cette tige dernière (la tige humaine) vient s’insérer dans le faisceau’les Primates ? Linéairement, c’est entendu, l’Homme ne fit suite à aucun Singe connu. Ni la petitesse de ses canines, ni la disposition serrée de ses dents antérieures, ni le bel arc de la mâchoire, ni la brièveté de su symphyse mentonnière, ni la disposition marcheuse de ses pieds ne semblent être des caractères dont on puisse croire qu’ils dérivent de n’importe quel primate (vivant ou fossile) actuellement connu. Il y a manifestement discontinuité, rejet entre la lignée des Hommes et celles des grands Singes. Mais ce rejet local lui-même n’est-il pas, si on regarde l’ensemble du groupe primate (et plus généralement l’ensemble de tous les vivants), une concordance, c’est-à-dire une continuité de plus ?… Les Primates se distribuent, au cours du temps, sur une série de lignes en apparence indépendantes, mais assujetties dans leur ensemble à se relayer l’une l’autre dans la direction d’une face plus courte et d’un plus grand cerveau. L’Homme apparaît, dans l’Histoire de la Vie, au moment précis où ce processus d’approximations successives arrive £. son terme. Il surgit en plein milieu du cercle. On songe, en le voyant paraître, aux étamines qui se découvrent au cœur des pétales d’une fleur. Comment les étamines seraient-elles étrangères à la fleur ?… Pour flatteuse qu’elle soit, notons-le bien, cette perspective n’est pas une illusion anthropocentrique. Du simple point de vue positiviste, il ne paraît pas niable, que les démarches de la Vie (qu’il s’agisse d’Insectes ou de Vertébrés) se soient toujours dirigées, en fait, vers la réalisation du système nerveux le plus riche et le plus différencié. La quantité et la qualité de conscience, pourrait-on dire, ont toujours été en croissant à travers les temps géologiques. Dans ces conditions, l’Homme en qui l’organisation des nerfs et donc les puissances psychologiques ont atteint un maximum incontesté, peut être considéré, en bonne science, comme un centre naturel de l’évolution des Primates. Mais s’il apparaît ainsi en achèvement naturel du travail des forces vivantes, c’est donc qu’il fait, en quelque manière, corps avec l’édifice entier de leurs productions. Et voilà bien où il faut en venir par un chemin ou par un autre. L’Homme, si à part qu’il soit, par certains côtés, des anthropomorphes qui lui ressemblent le plus, n’es ! pas zoologiquement sépaiable de l’histoire de leur

troupe. Que si l’on doutait encore de cet’e liaison, il sufrait, pour ne pouvoir plus la nier, d’observer avec quelle perfection la structure en feuillets grossièrement concentriques, qui est celle de l’ordre entier des Primates, se poursuit en plus petit, mais identique à elle-même, à l’intérieur des Hominiens. L’humanité, regardée superficiellement, paraît former un bloc zoologiquement homogène. Analysée plus profondément à la lumière de la Paléontologie, elle se résout en fibres complexes qui semblent ravonner en divergeant d’un point situé très bas (Ib., p. "164).

Nous n’avons pas à revenir ici sur ce qat nous avons exposé plus haut louchant la valeur de l’argument général de continuité, excluant la possibité ou du moins la vraisemblance scientifique d’une formation de toute pièce et instantanée, d’un orga nisme tel que l’organisme humain. On peut reconnaître cette valeur sans être amené pour autant à soutenir la thèse du transformisme généralisé, d’après laquelle l’organisme humain procéderait, tel quel et sans intervention spéciale de Dieu, d’une souche animale. On peut, en effet, entre la thèse créationnisle et celle du transformisme généralisé proprement dit, en concevoir une autre qui admettrait que Dieu est intervenu à l’origine de l’humanité, non seulement pour la création de l’âme spirituelle, mais pour constituer dans sa réalité totale et humaine le type humain, l’infusion de l’âme spirituelle ayant été transformante dans le plein sens du mot, d’un organisme préexistant qui ne serait jamais arrivé, de lui-même et laissé aux seules lois de la nature, au type corporel caractéristique de l’humanité.

Nous verrons plus loin pourquoi cette théorie, qui maintient à l’origine de l’humanité une action de Dieu spéciale portant sur l’homme tout entier et excluant une genèse naturelle animale pour l’organisme humain, nous paraît scien Iniquement acceptable. Nous devons au préalable examiner les arguments positifs sur lesquels s’appuient les partisans du transformisme étendu à l’origine de l’organisme humain.

B) Preuves scientifiques du transformisme anthropologique. — Exposé et critique.

a) Preuves tirées de l’anatomie et de la physiologie comparées. — S’il suffisait de montrer que l’Homme est un Primate pour que sa descendance naturelle d’une souche animale soit par le fait même établie, il est bien évident que la démonstration serait aisée. Mais nous avons déjà vii, en traitant du transformisme en général, que l’existence d’homologies structurales entre deux organismes ne prouve pas nécessairement leur parenté physique. L’Homme peut avoir un membre pentadactyle et ne pas descendre par voie de filiation naturelle des Vertébrés dévoniens, qui ont manifesté les premiers cette disposition organique.

Wiedhkshbim s’est appliqué avec beaucoup de soin à rechercher tous les organes rudimentaires qui, à son sens, prouvent la descendance animale de l’Homme. Il n’en compte pas moins d’une centaine. Mais il ne semble pas qu’il ait montré qu’un seul de ces organes ait un caractère sûrement régressif, ce qui serait pourtant indispensable pour que sa thèse fût prouvée. Nous en dirons autant des faits empruntés à la tératologie, sur lesquels insiste avec complaisance cet anatomiste. Leur interprétation par le retour d’états ancestraux ne s’impose pas et il est facile de les expliquer par des arrêts ou des anomalies dans le développement fœtal, qui peuvent avoir des causes tout autres que l’atavisme.

On a fait un certain bruit, il y a quelques années, autour de la parenté sanguine démontrée par Fkiedbnrbigu entre le sang humain et celui des grands Singes anthropomorphes. Il s’agit là uniquement de similitudes physiologiques, qui suivent tout naturellement l’incontestable similitude anatomique qui fait de tous les Primates un groupe naturel.

o) Preuves tirées de la paléontologie et de la préhistoire humaine- — A lire certains ouvrages de vulgarisation, on pourrait croire que les découvertes du dernier demi-siècle ont apporté des preuves paléontologiques décisives en faveur de la descendance animale de l’espèce humaine. Si l’on y regarde d’un peu plus près, on est forcé d’avouer que cette preuve et encore très loin d’avoir été fournie. Voici l’état exact de la question :