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TEMPLIERS

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de l’Apôtre I, Cor., i, 23-2’( ; II, 7), scandale pour les Juifs, folie pour les Gentils, mais pour les élus, puissance de Dieu et sagesse de Dieu ; sagesse mystérieuse, venue d’en haut. — Sur l’indépendance du Nouveau Testament à l’égal de la philosophie antique, on trouvera un bon chapitre dans le livre du K. P. A. Allô sur Le Scandale de Jésus, ch. ix, Paris, 1927.

Le syncrétisme liturgique incline à voir, dans les rites chrétiens, soit des legs de la Synagogue, soit des emprunts aux divers cultes païens. Accidentellement, il pourra rencontrer certaines vérités de détail ; car si l’on met a part le sacrifice de la Nouvelle Loi, institué par Jésus-Christ, et les Sacrements, pareillement institués par lui, la liturgie de l’Eglise est le produit d’une élaboration séculaire ; elle a pu s’inspirer soit du rituel mosaïque, soit de coutumes universelles, et’parfois démarquer certaines formes extérieures du culte qu’elle devait faire oublier. Mais il va sans dire que de tels faits durent être rares et que, pour avoir le droit d’y croire.il faut les avoir démontrés. Loin de montrer aucun empressement à s’enrichir de dépouilles étrangères, l’Eglise ne cessa de veiller, avec un soin jaloux, sur la pxireté de son culte original.

Il y a d’ailleurs, dans le syncrétisme religieux, bien des nuances, depuis les affirmations catégoriques du naturalisme intégral jusqu’aux insinuations plus ou moins ouvertes du modernisme. A tous les degrés, il constitue un dissolvant énergique de la croyance catholique. 1

Cette matière essentiellement diffuse ne comportait guère, dans le Dictionnaire Apologétique, un développement distinct ; mais elle y affleure en maintes pages. Le lecteur désireux d’en relever les traces pourra consulter en particulier les articles Culte chrétien, Dogme, Eucharistie, Evolution, Expérience religieuse, Gnose, Initiation chhétibnnk, Jésus-Christ, Mitbra, Modernisme, Mystères païens, Paulinismb, Rédemption, Reliques, Sacrements, Saints, Sibyllb, Sylladus, Tradition, Trinité ; enfin les nombreux articles consacrés à l’histoire des Religions. Pour plus ample information, consulter les tables de IL Pinard de la Boullaye, L’Etude comparée des Religions, t. II.

A. d’ALÈs.


TEMPLIERS. — La publication de nombreux et d’importants documents inédits faite depuis quelque trente ans et les rétentes découvertes de H. Pinkeont singulièrement grossi le dossier de l’affaire des Templiers. La question de leur innocence ou de leur culpabilité a donc dû être examinée à nouveau. Nous l’étudierons sous ses divers aspects dans l’ordre suivant : I. Origine des Templiers. — II. Leur transformation. — III. Leur mauvais renom. — IV. L’arrestation du 13 octobre 1307. — V. Protestation de Clément V. — VI. Les aveux des Templiers. — VII. Leurs rétractations. — VIII. Agissements de Philippe le Bel. — IX. Mesures pontificales. — X. Double enquête ordonnée par le Saint-Siège. — XI. Ses résultats. — XII. I.a suppression des Templiers. — XIII. Le supplice des dignitaires. — XIV. La liquidation des biens de l’ordre. — XV. La question de la culpabilité. — XVI. Absence de preuves matérielles. — XVII. Valeur des témoignages oraux. — XVIII. Attitude du grand maître Jacques de Molai. — XIX. Présomptions en faveur de l’innocence des Templiers. — XX. La responsabilité de Philippe te fiel et de Clément V. — XXI. bibliogra..’. le.

I. Origine des Templiers. — Quelques chevaliers champenois et bourguignons vinrent eu Palestine sous la conduite d’Hugues de Payens, au début du xne siècle. Ils se fixèrent, vers iiiq, sur l’emplacement du temple de Salomon, à Jérusalem. On les désigna dans la suite, pour cette raison, sous le nom de chevaliers de l’ordre du Temple ou sous celui plus court de Templiers. De même, les filiales qui se créèrent en Europe s’appelèrent Temples.

Les compagnons d’Hugues de Payens constituèrent une société à la fois militaire et religieuse pour la défense des Lieux Saints. Aux trois vœux habituels de religion ils en joignirent un quatrième : celui de protéger les pèlerins et de surveiller les routes de la Palestine.

Le nouvel ordre eut des débuts difficiles. Le concile de Troyes (janvier 1128) sanctionna pourtant son existence, lui donna un costume particulier caractérisé par un manteau blanc pour les chevaliers, noir ou roussàtre pour les sergents et les écuyers (sur lequel Eugène III fera coudre une croix rouge) et pria saint Bernard de rédiger une règle à son usage.

Les prescriptions imposées à l’ordre étaient en général dures. Destinées à des soldats, elles recommandaient l’esprit de discipline et excluaient le luxe dans l’équipement. Point de jeûnes débilitants : des guerriers avaient besoin d’une nourriture copieuse et substantielle, de viande.de vin. Une vie mystique plutôt rudimentaire s’imposait (H. de Curzon, La règle du Temple, Paris, 1886, et G. Scunùiier, Die urspriingliche Templerregel, Fiibourg-en-Brisgau, igo3).

Mener la guerre contre les Infidèles nécessitait des ressources abondantes. Pauvre à l’origine, l’ordre du Temple reçut l’autorisation de posséder des terres ; il en eut non seulement en Syrie, mais dans l’Europe entière. Il s’entendit à merveille à cultiver celles qu’il obtint par donations ou par acquèls. Sa gestion financière ne fut pas moins remarquable.

IL La transformation des Templiers. — Les Templiers s’illustrèrent par de vraies prouesses militaires. Ils citaient avec fierté la défense deGaza (1171), la bataille de Tibériade (1187), la conquête de Damielte (1219), l’expédition d’Egypte (ia50). Mais leurs exploits ne réussirent pas à empêcher la décadence du petit royaume de Jérusalem et le retour offensif des Sarrasins. En 1291, la prise de Saint Jean-d’Acre par les Infidèles consomma la perte de la Terre sainte (L. Bhéhibr, l’Eglise et l’Orient au Moyen-Age. Les croisades, 4" éd., Paris, 1921, p. I14-i"5, 222-229, 2^5-a’|6). Dès lors, les chevaliers, n’ayant pu se fixer dans l’île de Chypre, refluèrent sur l’Europe où il possédaient d’importants domaines et des places fortes.

Eloignés de leur terrain d’action, ils se trouvèrent désormais dans la situation d’une armée permanente recevant la notification de la paix universelle. Ils n’avaient plus de raisons d’être, sinon en s’en créant de nouvelles par un emploi différent, mais utile à la chrétienté, de leurs ressources. A moins de se réformer, l’ordre n’avait plus qu’à se dissoudre.

Pour justifier leur survivance au commencement du xive siècle, les Templiers n’avaient guère à invoquer que les services géuéiaux qu’ils rendaient par leur habileté de financiers. C’étaient des manieurs d’argent incomparables, des administrateurs judicieux, positifs et pratiques. Ils eurent « agné très vite la confiance universelle. Leur crédit, comme banquiers, surpassa celui des Juifs et des Lombards, qui se montraient usuriers plutôt que financiers Leurs maisons, forteresses imprenables en mên a