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SPIRITISME

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organisation secrète, 1 hypothèse n’a rien d’invraisemblable. .Mais il dut surtout sa vogue à ce qu’il promettait une religion au rabais, un moyen à la portée de tous de communiquer avec les disparus.

Si le spiritisme avait, sur le second point, tenu ses promesses, il faudrait s’étonner non du grand nombre de gens adonnés aux pratiques spirites, mais de ce que le monde entier ne soit pas converti au spiritisme. S’entretenir familièrement avec les défunts : qui n’a eu ce rêve ? qui n’a formé ce désir ? Et il sullirait de quelques cas bien authentiques de communication, pour soulever le monde. On peut être assuré que les spirites se seraient employés avec xèle à les divulguer.

XI. L’Église catholique et le Spiritisme. — En face du spiritisme, quelle a été l’attitude de l’Église catholique ?

Elle a traduit sa pensée dans un certain nombre de documents. Ce sont surtout des réponses faites par l’autorité ecclésiastique à des questions proposées. Réponses peu nombreuses, réponses prudentes et réservées sur certains points, formelles et décisives sur d’autres. D’ordinaire, il y est parlé à la fois du magnétisme, de l’hypnotisme et du spiritisme. C’est que non seulement les questions posées portaient sur le magnétisme et l’hypnotisme autant que sur le spiritisme, mais la pratique d’une de ces catégories de faits amène, par un lien naturel, à envisager aussi les autres. Par exemple, le mouvement des tables tournantes ne serait-il pas l’effet d’un fluide magnétique ? Certaines connaissances et certains états du médium ne relèvent-ils pas de l’hypnotisme ?

Ces documents ne condamnent pas le magnétisme et l’hypnotisme en soi, ils en condamnent l’abus. Sont réputées abus la recherche de tins criminelles ou immorales, la prétention d’obtenir par des moyens naturels des tins d’ordre vraiment préternaturel. Le spiritisme proprement dit comporte l’évocation des esprits : cette évocation est toujours répudiée comme entachée de superstition et de divination.

Le document le plus complet et le plus solennel est une lettre adressée, le 4 août 1856, par le tribunal de l’Inquisition romaine, aux évêques du monde catholique contre les abus du magnétisme.

La lettre rappelle d’abord quelques actes antérieurs. Réponse particulière du 21 avril 1841, condamnant l’usage du magnétisme en tant qu’il viserait un objet non naturel, non honnête, qu’il emploierait des moyens en soi illicites. Condamnation de divers livres propageant avec obstination ces sortes d’erreurs. Réponse plus générale du 28 juillet 1 84 y- Le Saint-Office y déclare que « si l’on prend soin d’écarter toute adhésion à une doctrine erronée, tout sortilège, tout recours explicite ou implicite au démon, l’usage du magnétisme, entendu comme l’emploi de certains procédés physiques, par ailleurs de caractère honnête, n’est pas défendu par la morale, pourvu qu’on ne s’y propose pas une lin illicite ou en quoi que ce soit perverse. Il y aurait manœuvre criminelle et péché d’hérésie à faire appel à des données et à des procédés d’ordre naturel pour obtenir des effets surnaturels. »

e Cette réponse, continue le tribunal de la Sainte Inquisition, fixait suffisamment ce qu’il y a de permis et ce qu’il y a de défendu dans l’usage ou dans l’abus du magnétisme. Mais la malice humaine s’est accrue. Négligeant les modes naturels d’investigation, pour s’attacher à des pratiques anormales, les hommes se vantent d’avoir découvert un mode sûr de prédiction et de divination… De là les prestiges du somnambulisme et de la claire-vue, selon l’expression en

vogue, prestiges auxquels des femmes sans considération s’abandonnent sous l’action de passes où l’honnêteté n’est pas toujours respectée. En cet état, elles prétendent percevoir l’invisible, et se mêlent témérairement de discourir sur la religion, d’évoquer les âmes des morts, d’en recevoir des réponses, de découvrir des choses inconnues ou éloignées, et de pratiquer d’autres semblables superstitions ; pratiques de divination qui ne vont pas pour elles et ceux qui les emploient sans notables prolits. En tout cela, quelle que soit la part d’artilice et de prestidigitation, comme on fait appel à des moyens naturels pour obtenir des effets qui ne sont pas d’ordre naturel, il y a manœuvre tout à fait condamnable, entachée d’hérésie, avec scandale contre l’honnêteté des mœurs. » Voir Enchiridion Denzinger-Bannwart, n°" 1 653-1 654.

Le 24 avril 1917, le tribunal du Saint-Office rendait une décision qui porte plus spécialement sur le Spiritisme II avaitété demandé : « Est-il permis de prendre part, soit par médium soit sans médium, en usant ou non de l’hypnotisme, à des entretiens ou à des manifestations spirites, présentant même une apparence honnête ou pieuse, soit qu’on interroge les âmes ou les esprits, soit qu’on écoute les réponses faites, soit qu’on se contente d’observer, alors même qu’on protesterait tacitement ou expressément que l’on ne veut avoir aucune relation avec les esprits mauvais ? » La Sacrée Congrégation du Saint-Office a répondu : Non, sur tous les points. Acta Apostolicæ Sedis, 1" junii 1917, p. 268.

De ces documents, plusieurs parties débordent, nous l’avons noté, la question du spiritisme proprement dit. De plus, on insiste sur les fraudes dont les pratiques en cause sont souvent viciées Ce qui apparaît manifeste., c’estle jugement porté par l’Eglise contre l’évocation des esprits ou le recours aux âmes des morts, à savoir le fond même du spiritisme. Et selon la doctrine catholique, cette évocation, dans les conditions où procède le spiritisme, est illicite.

Sans doute, rien ne s’oppose, ni de la part de la raison ni de la part du dogme catholique, à ce que les âmes des défunts puissent communiquer parfois avec les vivants, et des exemples de pareilles communications paraissent sérieusement établis. Mais ni la raison ni le dogme catholique n’admettent que les âmes des défunts soient à la disposition des vivants pour satisfaire leur curiosité souvent vaine, pour se prêter à leurs fantaisies, pour donner lieu à des exhibitions d’ordinaire puériles, théâtrales, souvent bassement foraines. Dans la région de l’au-delà, les âmes désincarnées sont, de fait, sous la dépendance de Dieu, totalement suivant la doctrine catholique, plus entièrement quelles l’étaient durant leur temps d’épreuve ici-bas suivant toute doctrine philosophique raisonnable : ne sont-elles pas affranchies des sollicitations contraires suggérées par l’imagination et les sens ? Or, i serait impie de rendre la sagesse de Dieu complice de toutes ces manifestations, trop souvent dénuées de motif sérieux ou de gravité.

Quant aux âmes sincères qui ne cherchent dans les pratiques du spiritisme qu’un moyen de conserver le contact avec des êtres ravis à leur affection, elles peuvent se rendre compte, si elles y réfléchissent, que les prétendues réponses faites ne s’accordent, par leur caractère vague, insignifiant, banal, ni avec leurs intimes désirs ni avec ce que nous pouvons savoir de la sage et aimante providence de Dieu.

On a pu enregistrer, comme mieux fondées en vérité, quelques apparitions brèves d’àmesde défunts, arrivées au moment précis de la mort ou dans les