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SOCIALISME

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n’était point parfaite entre les Bourses et la Fédération des Syndicats. Les premières avaient une base régionale, réunissaient autour d’un centre provincial, et par les services signalés plus haut, tous les groupements ouvriers d’alentour. La seconde avait adopté un lieu professionnel et prétendait grouper, dans ses syndicats respectifs, les travailleurs de même métier, à travers le pays..Mais nous avons noté combien elle était demeurée strictement encore sous la dépendance des Partis socialistes politiques, tenda t pourtant à s’émanciper. Et, après nombre d’incidents, de discussions plus ou moins acerbes, trop longues à répéter ici, au Congrès de Limoges, en 1890, les Bourses du travail ei les Syndicats conclurent un premier accord qui s’intitula déjà La Confédération générale du Travail. En réalité, l’a livre ne fut vraiment affermie que sept ans plus tard, aux Congrès d’Alger, puis de Montpellier en

IÇ)02.

Ce groupement a toujours garde le trait, qu’il tient de ses origines, de représenter deux sections dont chacune conserve son autonomi : celle des Fédérations d’industries et celle des Bourses du Travail.

Comme ces dernières pourtant avaient primitivement quelques attaches ollicielles, étaient même subventionnées par les municipalités, elles ont été peu à peu remplacées, dans leur rôle et dans des fonctions identiques, par des Unions départementales tout à fait indépendantes de l’Administration.

Et la Confédération générale du Travail comprend donc, en premier lieu, une organisation centralisatrice — celle des Fédérations, — avec des syndicats qui relèvent d’une même corporation et possèdent, à travers le pays, des intérêts professionnels communs ; en second lieu, une organisation décentralisatrice — celle des Unions départementales — qui groupe localement les associations ouvrières, à quelque corporation qu’elles appartiennent. (Jouhaux, op. cit.,

P. " »)

i. s, à travers toutes les vicissitudes qui avaient ainsi amené l’unité du syndicalisme révolutionnaire, une question n’était pas encore pleinement tranchée. C’était « elle de l’attitude de ce syndicalisme vis-à-vis de son aîné, le socialisme politique, lui venu, vers la même époque, à la cohésion d’un pa’ti unique (réalisée au Congrès de Pi ris. en avril La Confédération générale du travail marquait, par sa fondation même, la tendance des tra1 l’autonomie si longtemps précaire. Mais la situation n’était pas encore absolument nette. Elle le devint, en 1906, par un acte auquel très sonvent l’on s’est reporté depuis, et que l’on invoque coiiiuie le document décisif, sous le nom de la charte d’. miens.

Le syndicalisme révolutionnaire y affirmait sa volonté de rester fidèle au marxisme.

« Le Congrès considère que cette déclaration est

une reconnaissance delà lutte do classes qui oppose, sur le’errain économique, les travailleurs en révolte contre toutes les formes d’exploitation et d’oppression, tant matérielles que morales, mises 111 œuvre par la classe capitaliste contre la classe ouvrière. »

T lis l’on précisait les buts immédiats « -t lointains, les méthodes opportunes, et l’on terminait par cette revendication de l’autonomie totale vis-à-vis « lu soc. al isuw politique :

« … Le Congrès décide qu’alla que le syndicalisme

a ; teigne son maximum d’effet, l’action economi ; ue doit s’exercer directement contre le patronal, les organisations confédérées n’ayant pas, en tant que groupements syndicaux, à se préoccuper des

partis et des sectes qui, en dehors et à côté, peuvent poursuivre, en toute liberté, la transformation sociale. »

La séparation était faite. Restaient donc en présence deux groupements : le Parti socialiste unifié dans le domaine politique, la Confédération générale du travail sur le terrain économique. L’un fonde ses comités, poursuit ses campagnes électorales…, l’autre multiplie les syndicats et mène son action spéciale.

Les choses en restèrent là, avec des alternatives de rapprochement, d’éloignement, de bons rapports, d’aigres propos, pendant les années d’avanl-guerre et la durée des hostilités.

Il faut dire qu’au moment où, aux environs de 1906, la Confédération générale du travail signifiait assez brutalement son congé au Parti socialiste, et veillait à maintenir les distances, elle était sous l’inlluence immédiate de ses premiers meneurs, presque tous d’origine anarchiste. Alors, la tactique adoptée voulait qu’on isolât le « prolétariat », pour eu faire une force d opposition capable de briser tous les vieux cadres, le patronat, l’Etat. D’où la tendance à se séparer même de compagnons qui n’avaient peut-être pas des impatiences aussi vives ni des procédés aussi péremptoires. L’on reno çaii au principe majoritaire du socialisme démocratique politique, pour exalter la valeur des minorités

« conscientes » et décidées.
« Si i’on est conscient avait dit Pouget, l’un des

chefs d’alors, on s’aperçoit que, dans la société, n’ont de valeur que les êtres de volonté, ceux qui ne subissent p » s l’ambiance majoritaire, les révoltés. »

Plus tard, il y eut certains accommodements facilités ou réclamés par la période critique de la guerre. La charte d’Amiens n’a pourtant jamais été rejeté* ni démentie, sauf par ceux qui ont opéré le schisme exigé par le bolcltevisme.

Mais avant d’en venir aux heures qui ont vu de grandes modilications dans les destinées du socialisme politique et du syndicalisme révolutionnaire, il semble utile de confronter les deux mouvements, de noter leurs caractères respectifs et leurs différences ou leurs oppositions.

e) Socialisme politique et Syndicalisme révolutionnaire.

[.es tendances. — Il y a d’abord entre eux une différence foncière, qui vient des aspirations pins ou moins conscientes qui les meuvent. Mais, pour apercevoir nettement ces aspirations et les analyser en détail, une philosophie est nécessaire que ne possède évidemment pas L’immense majorité des adhérents. C’est le fait des meneurs ou de ceux qui suivent, du dehors, les marches respectives. En comparant les deux allures, ils relèvent cequi les distingue et parfois les oppose.

Il faut le noter pourtant. Plusieurs des traits de ce parais ïli -n’ont toute leur netteté que dans la théorie, la pratique les a estompés ou partiellement défoi niés, si bien que les ileu x mouvements n’offrent point, dans leurs physionomies mobiles et vivantes, le même contraste que dans leurs portraits. Il n’en e-l 1 as moins vrai qu’on est en dr.it de rechercher les tens naturelles et profondes, en dessous des coup ranls de surface et des remous.

Le socialisme politique, disent donc les observateurs, part d’une con. eplmii nettement intellectuelle. Il se présente comme une conception systématique, agencée, avec ses principes absolus et ses déductions logiques. Il parle au nom de la science, en laquelle il garde une foi aveugle on naïve, une foi intolérante aussi. L’un de ses dogmes était la