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SCOLAIRE (QUESTION)

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de laïcisation, tel surtout qu’il a été appliqué par Jules Ferry et, plus tard, par Emile Combes, qui a donné au problème des franchises de l’école primaire libre toute l’importance morale qu’il revêt aujourd’hui. En de telles conditions politiques, apparaît nettement le motif impérieux de consacrer légalement le droit des écoles primaires libres à recevoir des subventions publiques, pour pouvoir tenir devant des charges matérielles devenues écrasantes et pour exonérer partiellement leur clientèle du fardeau inique d’un double budget. Mais il s’agit alors de subventions qui puissent couvrir beaucoup plus que le dixième des dépenses totales de l’établissement. A l’instar d’un bon nombre de législations étrangères, dont l’exemple est plein d’encouragements pour la prospérité de l’enseignement et la pacilication religieuse, il s’agit surtout de subventions dont l’existence et la quotité ne dépendent pas de la volonté aléatoire et arbitraire des détenteurs du pouvoir national ou communal, mais qui soient déterminées en principe par une règle obligatoire et uniforme, c’est-à-dire mesurées en proportion du nombre des élèves de chaque école.

L’exemple des pays étrangers montre que les modalités d’application peuvent être des plus variées. L’examen du budget actuel de l’Instruction publique permet de conclure que, si les écoles publiques sont véritablement instituées pour le service du public et non pour d’autres fins, il est possible et facile, sans porter atteinte aux intérêts légitimes des maîtres et des élèves, d’opérer des économies importantes par suppression d’écoles et d’emplois de l’enseignement officiel qui ne répondent à aucune utilité sérieuse. Beaucoup de bons esprits jugent également qu’une économie désirable et réalisable consisterait à renoncer au dogme de la gratuité universelle et absolue de l’enseignement primaire public : il n’y aurait aucun attentat aux droiis de l’homme et du citoyen dans le fait d’exiger, à l’école publique comme à l’école libre, une modeste rétribution scolaire de toutes les familles qui ne sont pas dans l’indigence. On ne voit pas pourquoi beaucoup de gens aisés, disposant d’un assez large superflu, auraient le droit intangible de recevoir sous forme d’aumône de la puissance publique une chose d’intérêt aussi primordial pour eux-mêmes que les frais d’instruction de leurs enfants. Bref, une révision et une péréquation des dépenses publiques en matière d’enseignement répondraient aux exigences de l’intérêt national et libéreraient dea crédits importants, qui deviendraient disponibles pour des subventions, en quotité proportionnelle, aux écoles primaires libre ». Ecoles dont l’existence même, il faut le redire, engendre une économie sérieuse sur le budget national et communal de l’enseignement obligatoire.

Le projet très modéré de subventions proportionnelles aux écoles libres, dont la Chambre fut saisie en 1922, par M. le marquis de Baudry d’Asson et soixante de ses collègues, pose légitimement le principe et introduit une première base intéressante de discussion.

3° La propagande à exercer.

La Répartition proportionnelle scolaire ne supprimerait aucun des autres droits et devoirs de la famille et de la cité par rapport à l’école. L’Etat sera toujours tenu d’empêcher que l’enseignement des écoles publiques prenne un caractère oiFensant pour les consciences croyantes, pour l’ordre public de la cité, pour l’honneur et la sécurité de la patrie. Les catholiques seront toujours tenus de faire prospérer des œuvres et institutions complémentaires de l’école pour les nombreux enfants de leur culte qui.

faute d’écoles libres ou par option malencontreuse des familles, continueront de fréquenter l’école laïque. D’autres groupements que les croyants pourront recourir au bénélice de la Répartition scolaire, dès lors qu’ils justifieront du nombre d’élèves exigé par la loi. L’Etat respectera leur droit légal, dans la mesure même où. de telles écoles ne seraient pas constituées pour combattre l’ordre public et l’idée de patrie. Nous doutons, d’ailleurs, que les communistes et bolchevistes cherchent à créer, pour répandre leurs doctrines, des écoles libres subventionnées. Ils recourent, de fait, à une autre méthode beaucoup plus avantageuse pour eux-mêmes et beaucoup plus dommageable, soit au budget de l’Etat, soit à l’honneur de l’enseignement primaire public. La participation des écoles libres au budget national et communal engendrera, sans contredit, un droit de contrôle de l’Etat au sujet de l’exacte attribution des fonds, c’est-à-dire au sujet du nombre réel des élèves. Mais ce contrôle existe déjà d’après la législation actuellement en vigueur, et n’ajoutera aucun article nouveau à l’inspection officielle et universitaire, telle qu’elle fonctionne présentement. Réserve faite de l’hygiène publique, de l’ordre public et de la morale publique, l’enseignement lui-même devra demeurer libre dans une école subventionnée, tout autant qu’il peut l’être aujourd’hui dans une école alimentée exclusivement par des ressources privées. La subvention budgétaire ne sera pas une rétribution octroyée à tel ou tel enseignement ; mais un concours accordé aux familles pour leur permettre de faire face, selon leur conscience, au devoir légal de l’obligation scolaire.

Au cours des journées d’études, consacrées en 1923, à Paris, au problème de la Répartition scolaire, les conférenciers qui travaillent assidûment à propager cette idée furent unanimes à témoigner, avec M. Jean Guiraud, de l’accueil favorable, chaleureux même, qu’elle rencontre dans les auditoires populaires. Le système a quelque chose de clair et de simple, il fait appel à un instinot naturel de justice et d’équité, il réclame pour le droit des familles une garantie loyale, qui pénètre aisément les intelligences, qui touche intimement le cœur et qui, parfois, soulève un enthousiasme puissant. Les milieux populaires, devant un tel projet, ignorent les hésitations que l’on rencontre dans certains milieux politiques ou intellectuels.

Dans tous les milieux, néanmoins, l’idée génératrice de la Répartition proportionnelle scolaire gagne silencieusement du terrain. Le succès de la Répartition proportionnelle communale des secours aux enfants indigents suggère cette réflexion que la même règle d’équité, qui est reconnue valable pour la nourriture et le vêtement corporel, ne serait peut-être pas moins impérieuse pour le pain spirituel de l’instruction à l’école. La loi sur les Pupilles de la nation est venue rendre hommage à ce principe, que les subventions scolaires attribuées aux orphelins ou orphelines de la guerre auraient leur affectation dans l’établissement, public ou libre, choisi par la famille. Une règle analogue a prévalu, quoique non pas sans résistance, dans l’application de la loi Asticr sur l’enseignement professionnel et postscolaire, avec subventions officielles. Des votes parlementaires ont eu lieu à propos de la loi sur l’éducation physique et, plus récemment, à propos de la subvention nationale pour le Prêt d’honneur aux étudiants peu fortunés : nonobstant l’oppositioiv des survivants de la tradition jacobine, la thèse qui a prévalu est celle de l’équitable participation des élèves de l’enseignement libre, conjointement avec les élèves de l’enseignement public.