Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 4.djvu/58

Cette page n’a pas encore été corrigée

103

POUVOIR PONTIFICAL DANS L’ORDRE TEMPOREL

! 04

et la dignité du Siège apostolique. Et aujourd’hui que la paix est rotablie entre le » nations, Nom demandons de nouveau et plu » expressément que le Chef de V Eglise cesse de se trouver dans cette condition anormale qui, pour bien des raisons, est également funeste à la tranquillité des peu/îles.

Il faut prendre acte de cette revendication péremptoire. Une fois de plus, le Pape déclare que la situation politiqueet juridique faite au Saint-Siège, depuis La chute du pouvoir temporel, ne sauvegarde pas suffisamment la liberté et la dignité du Souverain Pontilical.

Mais quel est donc le grief qui est à la base des protestations du Saint-Siège, sous Pie IX, Léon XIII, Pie X, Benoit XV, alors que la loi italienne du î.’imai 1871, censée actuelleinenten vigueur, contient des « garanties » d’une incontestable clarté pour l’indépendance et la Souveraineté personnelles du Pontife romain, les franchises de son gouvernement religieux et la liberté de ses communications avec l’univers catholique ?

Sans entrer dans les questions de détail, le grief essentiel, capital, sera que la loi des garanties est une loi italienne, dont l’application, dont l’interprétation dépend exclusivement du gouvernement italien, dont la modification ou la suppression dépend du flux et du reflux des majorités parlementaires dans le seul royaume d’Italie.

Aucune garantie de Droitinternationaln’existeprésentement, dont les Etats qui possèdent de nombreux citoyens catholiques et qui ont un spécial intérêt au maintien de l’indépendance pontificale aientlemoyen de contrôler l’exerciceet de requérir l’application. La liberté du Saint-Siège est, légalement parlant, une affaire italienne et rien qu’italienne. Personne autre que l’État italien n’est juge de l’extension et des sauvegardes qu’elle comporte. La condition politique du Souverain Pontife est tout entière à la merci du bon ou du mauvais vouloir d’un gouvernement unique : celui-là même qui l’a dépouillé naguère de-son pouvoir temporel. Vraiment, la garantie est trop précaire. Elle ne peut suffire à donner les sûretés permanentes qu’exige l’importance du droit sacré qui est en cause.

Et telle est la raison d’être fondamentale des protestations du Saint-Siège.

En d’autres termes, et quelle que doive être un jour la formule précise de pacification, le Vatican cherche à internationaliser le problème des garanties de l’indépendance pontificale, tandis que le Quirinal et la Consulta s’obstinent, jusqu’à présent, à [’italianiser, à lui donner une solution de légalité purement italienne, que la Papauté ne saurait tenir pour normale et satisfaisante. L’Encyclique Pacem Dei nous en apporte un nouveau témoignage.

Néanmoins, une atténuation importante est admise dans l’une des règles de protocole international par lesquelles le Saint-Siège traduisait sa protestation persistante contre la condition politique qui lui est faite à Home depuis la chute du pouvoir temporel.

Jamais les Papes n’ont accepté lasituation résultant de l’usurpation du 20 septembre 1870 et de la loi italienne du 13 mai 1871. D’un geste fier, ils ont refusé la dotation annuellede 3.a55.ooofrancs queleur attribuait le législateur italien. Plutôt que de mettre le pied sur le territoire occupé par le gouvernement usurpateur et de paraître accepter du même coup le fait accompli, les Papesse sont absolument imposé, depuis plus d’un demi-siècle, une captivité volontaire dans le palais apostolique du Vatican. Là, du moins, ne s’exerce aucune autre souveraineté que la leur.

Ils ont, d’autre part, décidé que nul chef d’État appartenant à la religion catholique ne serait admis

à l’audience du Souverain Pontife s’il ne s’interdisait, à Rome même, tout contact avec la cour et le gouvernement du Quirinal. Aucune exception ne fut admise, pas même en faveur du roi Carlos de Portugal, proche parent de la Maison de Savoie, pas même en faveur de l’empereur François-Joseph d’Autriche, qui était (jadis) l’allié politique du royaume d’Italie et redevable d’une visite officielle au roi Humbert. Cette règle protocolaire fut violée, le a^ avril 1904, malgré les avertissementspréalablesdu Saint-Siège, par M. Emile Loubet, président de la République française, quand celui-ci rendit visite, à Rome même, au roi Victor-Emmanuel. Mais la protestation énergique du cardinal Merry del Val, secrétaire d’Etat de Pie X, définit avec clarté le pointde vue pontilical et donna un spécial relief à l’affirmation des principes. L’incident fut, d’ailleurs, le premier acte de la rupture diplomatique entre la France olliciello et le Vatican.

Sauf cette exception malheureuse, qui contribua, du reste, à confirmer la règle, les chefs d’Etat et princes catholiques se résignèrent unanimement, depuis 1870, à ne jamais paraître à Rome en voyage officiel. Ceux d’entre eux qui demandèrent et obtinrent audience au Vatican, tel le roi des Belges Léopold II, se rendirent à Romeen voyageprivé, gardant rig ureusement [’incognito diplomatique à l’égard du Quirinal et de la cour d’Italie.

Mais on doit avouer que l’impossibilité moralede visiter officiellement le roi d’Italie au Quirinal constituait pour les chefs d’Etat et princes catholiques, pour le roi d’Espagne et le roi des Belges, pour les présidents catholiques des Républiques latines, et, au lendemain de la reprisedes rapportsavec le Vatican, pour le président de la République française, un embarras des plusdommageables aux tractations internationales en vue de la paix des Etats ou des peuples. La situation présente de l’Europe et du monde, situation troublante et chargée des pires menaces, suggérait au Père commun des fidèles d’écarter, autant qu’il était en lui, une cause de malaise et de difficultés diplomatiques venant, pour les souverains catholiques, s’adjoindre à toutes les autres. Benoît XV annonce donc, dans l’Encyclique Pacem Dei, l’intention de tempérer quelque peu la sévérité des conditions légitimement établies par ses prédécesseurs, à la suite de la destruction du Pouvoir temporel des Souverains Pontifes, dans le dessein de rendre impossibles les vis tes officielles des princes catholiques à Rome, chez le roi d’Italie. Conformément aux vœux du gouvernement de Madrid, du gouvernement de Bruxelles, et, en dernier lieu, du gouvernement de Paris, le Pape consent désormais à recevoir au Vatican les chefs d’État et princes catholiques qui auront visité officiellement le roi d’Italie au Quirinal. Très noble sacrifice, consenti à la cause de la paix universelle et des bons rapports internationaux.

Les audiences des souverains catholiques au Vatican seront réglées par le même protocole que les audiences des souverains non catholiques. Protocole qui atteste lemaintiendesrevendications pontificales et qui traduit en actes la protestation des Papes contre l’usurpation de la Souveraineté territoriale des anciens Etatsdc l’Eglise par le royaume d’Italie.

Ce n’est jamais, en effet, du Quirinal ou de quelque édifice occupé par l’Etat italien, que les princes non catholiques peuvent se rendre à l’audience du Souverain Pontife. Mais il leur faut partir du domicile officiel de leur représentant diplomatique auprès du Saint-Siège, s’ils en ont un, ou, s’ils n’en ont pas, d’un établissement religieux de leur propre nationalité, ou même du domicile officiel de leur repré-