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SAINTS

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xxiv) entre l’illustre mémoire de ( vprien de Carthage et la légende de Cyprien d’Antioche, donnent un échantillon des erreurs possibles. Voir Antdectu BoUantiana, t. XXXIX, nji, p. 31’r.î : 5a. Le nom de Juan Mkmhjcvnh (Saint ; voir cet article) .1 pu de même couvrir des souvenirs relatifs à divers personnages, sans détriment pour la réalité historique du personnage canonisé.

Mais pour généraliser de telles observations, il faudrait avoir des raisons positives.

On a parfois supposé trop facilement que l’emploi de Pépithète sunctus, dans les inscriptions et dédicaces païennes, a pu donner lieu de confondre les dieux de l’Olympe avec les héros chrétiens, et d’admettre dans les colonnes du Martyrologe toute une population exotique ; de ce fait, supposé gratuitement, on a voulu tirer un argument triomphant en faveur de la thèse qui présente les saints comme les successeurs des anciens dieux. Construire un pareil système est facile ; mais il faudrait relayer de faits dûment constatés. Il n’en existe pas. Un seul paraît résister quelque peu à la discussion : c’est la mention, rencontrée dans tel manuscrit du Martyrologe hiéronymien, d’un certain saint Silvain, honoré à Livroux au territoire de Bourges, àla datedu22 septembre. La leçon propre à ce manuscrit peut suggérer que la fête naquit d’une ancienne dédicace au dieu Silvain. El c’est tout. Il n’y a pas, dans une observation aussi précaire, de quoi fonder une théorie. Notons par ailleursque l’Eglise honore en divers lieux plusieurs saints Silvain, parfaitement authentiques. Voir H. Dblkhayb, Sa ne lus Silvanus, dans Analectu Bollandiana, t. XXV, iyoG, p. 158-if>2.

Une bizarre aventure a pu introduire dans les éditions de saint Jean Damascène et dans le Martyrologe romain. les héros d’un roman bouddhique, nullement désignés pour un tel honneur. Les origines de cette légende remontent au sixième ou au septième siècle ; si elle a jamais servi de fondement à un culte, ce serait là, tout au plus, un accident .ocal et de faible conséquence. Le fait, aujourd’hui très connu, mérite d’être signalé, pour aider à mesurer la distance qui sépare le culte vivant des saints honorés par 1 Eglise et la tradition littéraire des Martyrologes. Voir J. Van den Ghbyn, art. Barlaam et Josaphat, dans Dict. de Théolog. Cath. (io, o5) ; A. d’ALÈs, /.’Apologie d’Aristide et le romande Burlaain et Josaphat, R.Q.H., t. CI (<yi(), p. 354"9-Noter de tels accidents n’est pas déprécier la liturgie de l’Eglise, mais dégager de toute contingence l’élément de Foi, contenu dans le culte des saints, et parfaitement reconnaissable dans toute la trame de nos Martyrologes ; avant tout, le caractère profondément humain, moral et sérieux, de ce culle, essentiel au vrai christianisme. Comme il nait du culte rendu à Dieu même et tend à honorer Dieu dans la personne de ses vrais amis, il forme l’antithèse exacte des aberrations païennes, qui prostituaient à la créature l’hommage du au Créateur.

Les Acta Sanctorum. — Nous traiterons ici, par manière d’appendice, des Acta Sanctorum, publication monumentale à laquelle l’illustre Société des Bollandistes a attaché son nom. Rien ne montre mieux, que cette œuvre méthodique et savante. les pensées dont s’inspire l’Eglise catholique dans le culte des Saints. Nous empruntons les principales données à l’ouvrage du 11. P. II. Delahayb : A travers trois siècles. L’œuvre des ftollandistes ( 1 6 1.">- 1 y 1 5). Bruxelles, Kjao.

Par delà Jkan Bolland, dont le nom demeure indissolublement lié à l’entreprise des Acta Sunctui um. la justice veut qu’on remonte jusqu’à Hkrmirt Roswey, qui avait ouvert la voie.

En iGo3, le P Olivier Manare, originaire de Tournai, envoyé parle P. Claude Aquaviva. général de la Compagnie de Jésus, visitait les maisons de la province belge. Un jeune religieux l’entretint des rechercbesqu’il poursuivait, depuis une douzaine d’années, dans les bibliothèques de Belgique, sur la vie des saints, et lui exposa l’opportunité d’entreprendre une collection hagiographique. Il lui remit à ce sujet un mémoire, qui obtint l’approbation d’Aquaviva.

Iléribert Roswey, né à Utrecht le ai janvier 156g, jésuite en 1588, avait été reçu maître es arts à l’Université de Douai en 15<ji. Dès lors il avait commencé, à travers les bibliothèques, la chasse aux manuscrits. L’enseignement le retint à Saint-Omer jusqu’en 160*J. Fixé alors à Anvers, il traça le plan

« le sa future publication clans un petit volume, intitulé : 

Fasli sanctorum quorum vilæ iu belgicis biblio-Ihecis mantis- ! iptac. Les manuscrits hagiographiques par lui découverts 6’élevaienl au chiffre de i.300 ; de la plupart il s’était procuré des copies. Quant à l’œuvre projetée, elle était de proportions grandioses, ne devant pas comprendre moins de 18 volumes in-folio, dont 3 de préliminaires et’.' de compléments ou de tables.

Le projet ne rencontra pas que des encouragements. Le l’uturcardinalBellannin.qui avaitenseigné à Louvain, écrivait, le 7 mars 1608 : à quoi bon un tel effort ? que de temps il faudra, et que d’argent ? Et puis, n’y a-t-il pas, dans ce fatras hagiographique, beaucoup de pages négligeables, moins propres à édifier les lidèles qu’à rendre la religion ridicule ? Mais la ténacité flamande ne reculaitpas devant l’objection. A travers mille occupations qui le tiraient en divers sens, Roswey sut réaliser une partie au moins du plan qu’il avait conçu. En 1613, il mettait au jour son édition du Martyrologe d’Adon ; en 1616, ses Vilæ Patrum, où il fait revivre l’épopée monastique de l’Egypte et de la Syrie, et qui demeurent son meilleur titre de gloire. La pierre fondamentale des Acta Sanctorum était posée. Le 5 octobre 1629, Roswey expirait, d’une maladie contagieuse, contractée au chevet d’un mourant.

Son héritage littéraire fut remis aux mains d’un homme digne de le recueillir, le P. Jean Bollandus, alors préfet des études au collège de Malines et déjà connu dans le monde savant par son application à l’étude de l’antiquité. Invité à mettre en valeur les trésors amassés par Roswey, Bollandus se montra prêt à entrer dans cette voie, mais crut devoir marquer les conditions nécessaires : on le laisserait libre de son plan ; on mettrait à sa disposition exclusive leslivres utilisés par l’éditeur des Vitoe Patrum. En 1630, il quittait Malines pour s’installer à Anvers et se consacrer tout entier à l’œuvre.

Entre ses mains, le programme primitif allait encore s’élargir. Il décida de ne pas restreindre la collection aux saints dont on possède les Actes proprement dits. Il adopta une disposition extrêmement nette : le dossier de chaque saint formerait un tout. Il engagea.de toutes parts, une vaste correspondance. Bientôt l’on put prévoir qu’il succomberait à la tâche ; il fallut lui donner un assistant ; pour la réalisation de ce projet, Antoine de Winghe, abbé de Liessies, qui avait été pour Roswey un ami de la première heure, constitua un fonds de Soo florins.

A une juste appréciation des conditions requise » par toute coopération intellectuelle, Bollandus joignait le don de comprendre les hommes et de se les attacher. La Providence lui ménagea d’admirables collaborateurs, en la personne des PP Godefroid Henscheniuset Daniel Papebroeh ; l’un et l’autre formés, de bonne heure, à son école Les générations de Bollandistes qui. depuis près de trois sièeles, se pas-