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SAINT-OFFICE

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->icge (1, p. » 85), « Alexandre VI, fatigué des clam -urs continuelles dont Torquemada était l’objet, voulut le dépouiller de la puissance dont il l’avait nvesti. Il n’en fut détourné que par des considérations politiques : il voulait ménager la cour d’Espagne. » Toutefois, il le dépouilla d’une partie de ses pouvoirs, en lui adjoignant comme grands inquisiteurs « avec pouvoirs égaux aux siens » quatre prélats, Ponce de Léon, archevêque de Messine, résidant en Espagne, Enneco Manrique, évêque de Cordoue, Sanchez de la Fuenle, évêque d’Avila, et Alphonse Suarez, évêque de Mondognedo. Revenant même sur les décisions antérieures qui avaient organisé l’Inquisition, Alexandre VI enlevait au grand Inquisiteur Torquemada le jugement des appels à Rome en matière de foi, et les confiait à l’évêque d Avila.

Mais la mort de Torquemada, le 16 septembre 1^98, ramena les mesures de rigueur, en déterminant une réorganisation de l’Inquisition sous l’énergique impulsion de Ximénès.

Xim’ines. — Humble religieux franciscain, ce personnage s’était tellement imposé, par son intelligence et son caractère, à la reine Isabelle, qu’elle l’avait choisi pour confesseur et l’avait fait monter sur le siège primatial de Tolède. Il avait réformé, avec la plus grande énergie, son Ordre, il réforma de la même manière son diocèse. Il résolut de restaurer et d’étendre encore plus l’action de l’Inquisition, quelque peu ébranlée pendant les dernières années de Torquemada.

Il commença par faire nommer par les souverains catholiques son propre frère, le Dominicain Deza, grand Inquisiteur ; mais, sans doute poussé par lui, celui-ci n’accepta ces fonctions qu’à la condition de les exercer sans partage dans toute l’Espagne. Aussi le pape Alexandre VI ne se contenta pasde confirmer sa nomination (i cf septembre 1’198) ; l’année suivante, il étendit son autorité à tout l’Aragon. Bientôt après, un autre bref pontifical (a5 nov. 1501) rendit à Deza tous les pouvoirs qui avaient été enlevés à Torquemada et même les renforça en lui

t attribuant (1 5 mai 1602) la connaissance de tous les motifs de récusation allégués par les accusés et le pouvoir de faire juger par des subdélégués tous les appels apostoliques. (Llohente, IV, pp. 300-301).

Quoique archevêque de Tolède, Ximénès se flt adjoindre par le grand Inquisiteur à l’archevêque de Grenade Talavera dans l’œuvre, Ue conversion des Mores. Mais son ardeur l’emporta plus loin que son charitable collègue. Il multiplia les mesures de protection et de faveur pour les nouveaux convertis ; et ainsi put enregistrer, lui aussi, de nombreux néophytes ; en un seul jour, le 18 décembre

Un, il en baptisa, par aspersion, quatre raille !

«.es conversions étaient trop nombreuses pour

sincères ; elles étaient provoquées par des don ? d’argent et surtout par « le désir de jouir de la liberté comme les vainqueurs ». D’autre part, les chefs , r ieux de l’Islam réagirent pour maintenir leurs coreligionnaires dans leur foi ; ils déclarèrent que la manière d’agir de Ximénès violait les garanties de liberté religieuse stipulées par la capitulation de ijg - !  ; de leur côté, un certain nombre de bons catholiques blâmaient les excès de zèle de l’archevêque. Ces résistances ne faisaient qu’irriter Ximénès : « Si l’on ne pouvait con luire doucement les Mores dans le cheraindu salut, disait-il, il fallait les y pousser… Dans les affaires temporelles, les compromis sont bons quelquefois ; dans les affaires de Dieu, ils sont toujours impies. D’ailleurs, ce n’est pas quand le mahométisme penche vers la ruine que nous devons

iiK’surer nos coups ; il faut frapper aujourd’hui ». (Alvah. Gomez, p. 29).

Animé de pareils sentiments, il lit à Grenade un immense bûcher de tous les livres arabes qu’il put y trouver. Cet autodafé annonçait les autres. Les Mores se révoltèrent sur plusieurs points de l’ancien royaume de Grenade. En 1 490, >500 et 1501, après des combats acharnés, surtout dans les monts des Alpujarras, ils furent cruellement réprimés.

Les souverains catholiques, sans doute sur le conseil de Ximénès, crurentnécessairedechangerdepolitique ; ils établirent l’Inquisition à Grenade, et prononcèrent le bannissement de tous les Mores qui ne se convertirent pas, tandis que ceux qui se faisaient chrétiens, les Morisques, étaient exposés, comme les Marranes juifs, aux procès el aux condamnations du Sainl-Oflice. L’archevêque de Grenade lui-même faillit être victime de cette réaction. Suspect aux fanatiques, à cause de la charité qu’il avait témoignée aux Mores, il fut accusé d’être lui-même Marrane et poursuivi, au nom de Deza, par l’inquisiteur de Cordoue, avec l’assentiment de son ancien collaborateur Ximénès. Il ne dut son salut qu’à Jules II, qui évoqua la cause à lui et la flt juger par son nonce en Espagne, lequel prononça un non-lieu en 1007.

Ledit d’expulsion contre les Mores fidèles à leur religion nefutpasappliqué dansles états de Ferdinand le Catholique ; les seigneurs, qui tiraient des ressources considérables de leurs vassaux mores, les prirent sous leur protection et intervinrent auprès du gouvernement royal pour leur maintenir leur liberté de conscience. AuxCortès de Mouzon (1510), ils renouvelèrent une demande qui avait déjà été faite avec succès, en 1 488, et ils obtinrent la promulgation par le roi d’un fuero garantissant aux Mores des royaumes d’Aragon et de Valence pleine et entière faculté d’y résider et d’y commercer en professant librement l’Islam.

Ce privilège fut si bien observé, sous Ferdinand et dans les premières années du règne de Charles-Quint, que lorsque les comuneros se soulevèrent, en 15-20, les Mores combattirent vaillamment dans les armées royales, donnant ainsi une preuve non équivoque de leur loyalisme. Ils furent en revanche l’objet d’une haine particulière de la part des communes et du peuple ; le succès passager de la révolte eut pour effet la mort et l’expatriation de beaucoup d’entre eux et le baptême en masse des autres, au nombre de 16.000, dans le seul royaume de Valence.

Après avoir vaincu les comuneros, le gouvernement de Charles-Quint s’unit à eux pour achever la conversion des Mores. Il s’adressa au pape Clément VII pour obtenir d’être relevé du serment qu’il avait prêté d’observer fidèlement le fuero de Mouzon. Clément VII, qui était alors à la merci de l’empereur, finit par céder aux vives instances de l’ambassadeur espagnol, duc de Sessa ; et par une bulle du 12 mai 15a4, il l’invita à travaillera la conversiondes Mores, malgré le fuero de Mouzon, allant jusqu’à lui permettre de réduire en esclavage ceux qui lui résisteraient.

En même temps, il est vrai, il lui adressa un bref lui conseillant la modération. Charles-Quint n’en tintpas compte ; non seulement il considéra comme apostats les Mores convertis par la force, par les comuneros, et livra à l’Inquisition tous ceux qui revenaient à l’Islam ; mais encore, le 16 novembre 15a4, il promulgua un édit abolissant, dam toute la monarchie espagnole réunie sous son sceptre, l’exercice du culte mahométan. Tous les Mo-