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SACREMENT

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usages, celui de ne pas réitérer le baptême, la continuation et l’ordination, lorsqu’ils avaient été conférés dans l’Eglise catholique, implique la doctrine du caractère, doctrine qui est déjà insinuée par l’emploi, courant dès le second siècle, du terme sphragis (sceau) pour désigner le baptême et la continuation. La controverse baptismale enfin (Voir art. Baptême dbs hérétiques) provoque les décisions du pape BTTBNira (a56), et du concile d’Arles (3 1 4), qui déclarent la valeur du baptême indépendante de la foi du ministre.

Le travail de déduction du dogme de la pratique sacramentelle de l’Eglise est spécialement en progrès, dans la deuxième période, avec S. Augustin. Le saint Doeteur fut amené, dans ses controverses avec les Donatistes, à préciser le rôle du ministre et celui des dispositions du sujet dans l’eflicacité des sacrements, et à mettre en lumière la théologie du caractère. Sa doctrine est constamment proposée comme une explication de la pratique de l’Eglise.

La doctrine donatiste sur le ministre des sacrements est conditionnée par une conception puritaine de l’Eglise, qui se rattache au Montanisme et au Novalianisme : l’Eglise véritable ne se compose que de justes, elle n’admet pas le mélange des bons et des méchants, car les pécheurs sont exclus de son sein (Cf. Saint Augustin, Brevic.coll. 3 a dies, io ; Donatistarum litleræ ; P. L. f XLIII.834). Mais pour les besoins de leur cause — ils voulaient déposer l’évê que de Carthage, Cécilien, sous prétexte qu’il avait été ordonne par un traditsur des Livres saints, Félix évoque d’Aptonge, — les Donatistes spécialisèrent la question à la sainteté de la hiérarchie ecclésiastique : seuls les ministres saints feraient partie de cette hiérarchie. Les traditeurs et ceux qui, comme les évêques catholiques, font cause commune avec eux, cessent de lui appartenir. L’existence de la hiérarehiedépend ainsi totalement de la dignité morale des ministres de l’Eglise. En conséquence, les évoques notoirement indignes ne sont plus de vrais évêques, ils ont perdu le pouvoir d’administrer les sacrements (Voir les citations des écrits donatistes faites par S. Augustin Contra Litt. Petit., II, io, 12, 14, ai, 4°, 4a. 92 ; Contra Epist. Parmen., II, 28, 3a, etc). A cette conception erronée de la hiérarchie de l’Eglise, les Donatistes ajoutèrent la thèse des rebaptisants. Un ministre indigne est incapable de purifier le pécheur par le baptême. Et d’ailleurs en dehors de l’Eglise, comme l’enseignait S. Cyprien, le baptême ne peut être valable, puisque ni dans le schisme, ni dans l’hérésie, la rémission des péchés et la régénération ne sont possibles (Cf. S. Aug. Contr. Litt. Petit., II, vi, 13 ; De bapt. contra Donal., I, XYii, 26 etc.). En résumé, les Donatistes enseignaient : i°) qu’un ministre hérétique ou indigne a perdu les pouvoirs de son ordination et qu’il est par là-même incapable de conférer les sacrements d’une manière valable ; et 2) que le baptême reçu dans l’hérésie ou le schisme est nul, puisque seule l’Eglise véritable peut remettre les péchés et donner la grâce.

S. Augustin réfute la première partie du système donaliste en démontrant, par la doctrine du caractère, la permanence, dans le ministre indigne, des pouvoirs de son ordination. Ces pouvoirs sont inadmissibles, tout comme le baptême qui a été conféré validement. Or les Donatistes eux-mêmes admettent que ni l’hérésie, ni l’indignité ne font perdre le baptêmeàceux qui l’ont valablement reçu, puisqu’ils ne rebaptisent pas les apostats qui se convertissent. Pourquoi le ministre indigne perdrait-il les pouvoirs de son ordination plutôt que son baptême ?

« Xulla ostenditur causa cur ille qui ipsum

baptismum amittere non potest.jus dandi (sacramentum ordinationis) pol^st amittere. Utrumque enim sacramentum est. etquadam consecralione utrumque homini dutur : illud cum baptizatur ; istud cum ordinatur ; ideoqne in Catholica utrumque non licet iterari. » (Contr. epist. Parmen., II, 28). Les pouvoirs de l’ordination adhèrent aussi fortement à l’âme que la marque militaire au corps. Le ministre ne peut pas plus les perdre par son hérésie ou son indignité que le soldat déserteur ne peut effacer le « character hnpera loris » imprimé sur sa chair (Sermo ad Cæsar. eccl. pleb., a). S. Augustin est ainsi amené à mettre en lumière le caraclère sacerdotal, et il fait remarquer avec insistance que sa doctrine n’est qu’une explication de la pratique ecclésiastique de la non-réitération du sacrement de l’ordre. Les évêques ordonnés dans l’hérésie ou le schisme, dit-il, et qui se convertissent à l’Eglise catholique, ne sont pas réordonnés. Les évêques convertis ne sont pas toujours appelés à remplir, dans l’Eglise, les fonctions de leur ordre, mais lorsqu’on juge bon de recourir à leur ministère, ils ne sont pas ordonnés de nouveau. Réitère-t-on le « characler » indélébile du soldat déserteur, lorsque celui-ci revient au camp ? (Contr. Epist. Parmen., 11, 28.39). Le ministre du sacrement, par son caractère inamissible, reste toujours, quelle que soit son indignité, le représentant du Christ et de l’Eglise. L’acte par lequel il confère le sacrement est un acte même du Christ agissant par son Eglise. En quoi, dès lors, l’hérésie ou l’indignité du ministre pourraient-elles nuire à la valeur du sacrement ? (Cf. In Joan., Tract, v, 15, 18 -.Contra litt. Petit., III, 65-67).

C’est aussi à l’aide da la doctrine du caractère que S. Augustin explique aux Donatistes comment le baptême, conféré dansl’hérésie on le schisme, peut être valable sans produire la rémission des péchés. Un tel baptême confère le caractère, et par là-même il est valide et ne doit pas être réitéré : « Cliristiani baptismi sacramentum… etiam apudhæreticos valet et sufficit, ad consecrationem, quamvis ad vitæ aeternae participationem non sufliciat ; quæ consecratio reum quidem facit hæreticum extra Domini gregem habentem dominicum characterem, corrigendum tamen admonet sana doctrina, non iterum similiter consecrandum » (Epist., xcviii, 5). Mais ce baptême, reçu dans l’hérésie, ne remet pas les péchés, parce que le sujet, par son hérésie, « met obstacle à la réception des effets salutaires du sacrement » (Ibid., 10), et aussi parce qu’en dehors de l’Eglise catholique, comme l’enseignait S. Cyprien, les péchés ne peuvent être remis, ni la grâce donnée (Cf. De bapt. contr. Donat., IV, 1, a4 ; III, 21-a3). Le sacrement produira tous sesefî’ets, « revivra » comme diront plus tard les scolastiques, lorsque l’hérétique ou le schismatique se convertirontet entreront dans l’unité catholique : « In communionibus ab Ecclesia separatis passe homines baptizari, ubi Christi baptismus eadem sacramenti celebratione datur et sumitur ; qui tamen tune prosit ad remissionem peccatorum, cum quis reconciliatus unitati, sacrile gio dissensionis exuitur quo ejus peccata lenebantur, et dimitti non sinebantur » (Debapt. cont. Donat., I, 18). S. Augustin, ici comme plus haut, base sa doctrine sur la pratique de l’Eglise. Celle-ci considère comme validement baptisé, et donc comme incapable de l’être de nouveau, l’hérétique ouïe schismatique converti, bien qu’à ses yeux il n’ait pas obtenu la rémission de ses péchés ni la grâce. Cet usage ecclésiastique ne peut s’expliquer que par la distinction entre la grâce et le caraclère ; le dogme sacramentaire est toujours déduit de la pratique de l’Eglise.

Les controverses donatistes ont amené S. Augus